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Année 1923 - 4e numéro de la série

5è Conférence. -- 2 mars 1923

Mme GUYON, SA VIE ET SON ROLE DANS L'AFFAIRE DU QUIETISME

(suite)

Dès son plus jeune âge, la future Mme Guyon fait preuve de la vivacité d'esprit la plus surprenante, de l'exaltation la plus inquiétante, de la séduction la plus irrésistible, de l'imagination la plus folle.
Personne ne s'occupe d'elle. Dans le désœuvrement qui remplit ses jours, elle se livre aux exercices de charité et aux lectures. Elle se passionne pour Saint François de Sales, pour Mme de Chantal. La lecture de la vie et des lettres de Sainte Thérèse ajoute à son exaltation.
Peu à peu, elle a grandi. Elle est maintenant jeune fille. Sa mère s'aperçoit que sa fille est belle. Elle s'intéresse maintenant à elle. C'est l'heure de la première idylle. Mais M. de la Motte s'interpose et détruit ses projets. Jeanne se plonge alors dans la lecture des romans. Elle atteint 15 ans et ses parents songent à la marier, avec quelque bon gros mari bien riche, bien placide qui calmera son effervescence. Ils trouvent leur homme en la personne de Jacques Guyon, écuyer, seigneur du Chesnoy et de Champoulet. Le père de Jacques a été l'un des entrepreneurs du canal de Briare, et il a réalisé de fort beaux bénéfices. La famille de la Motte est plus riche encore.
Jacques Guyon a 38 ans. Jeanne en a 16. Elle lui est accordée le 28 janvier 1664, mais elle ne le connait pas ; elle le voit pour la première fois le 16 février et le 18 février le mariage est célébré.
Le contrat a été passé devant Me Antoine Hureau, notaire à Montargis, prédécesseur de Me Lafarge.
Jeanne se marie le coeur serré, avec un homme qu'elle n'aime pas et qui a vingt-trois ans plus qu'elle. Le lendemain de son mariage, on la trouve en pleurs dans la maison de la famille Guyon où elle habite avec son mari et sa belle-mère.
Cette maison existe encore ; elle est une des plus curieuses de Montargis ; elle occupe le numéro 18 de la rue du Four-Dieu et est habitée par M. et Mme Baldé.
« Je vis dans un quartier retiré » a dit Mme Guyon dans ses mémoires. II faut se rendre compte que Montargis était fort peu étendu à cette époque, que la famille de la Motte demeurait presque au pied de l'église, tandis que la maison Guyon était bâtie à la périphérie, contigüe aux anciennes murailles.
Mme Guyon, entre son mari et une belle-mère avare et acariâtre, regrette la maison paternelle, accueillante et très fréquentée. Personne n'était reçu en sa nouvelle demeure. Son mari lui parut sauvage et grognon et, dit M. Lesueur, elle s'aperçut, elle qui avait lu Saint-François-de-Salles, que « l'état de mariage est un état qui requiert plus de vertu et de constance que nul autre ».
Mme Guyon était mariée depuis quatre mois quand son mari fut pris d'un accès de goutte «qui n'était point prévu au contrat ». Elle l'entoura de soins les plus dévoués. « Il est du devoir d'une femme, écrit-elle avec indulgence, de souffrir les hommes en paix ».
M. Guyon guéri, témoigna sa reconnaissance en se livrant à quelques mondanités. « Mme Guyou, dit l'orateur, apporte alors à sa toilette des soins infinis ». C'est une très belle jeune femme, jalousée par ses camarades et dont le portrait, qui est au musée de Montargis, mais qui ce soir a pu être apporté dans la salle, grâce à l'obligeance de M. le Maire, ne nous permet point d'apprécier cette beauté qui ravissait les hommes et faisait enrager les femmes. II est vrai que ce portrait représente Mme Guyon à 44 ans.
Et, bien des événements avaient passé depuis lors.
Mme Guyon avait eu un premier fils, Jacques, en 1666. La même année, elle perdit sa mère. C'est alors que son esprit tourna vers le mysticisme. Un moine du couvent des Récollets qu'elle va consulter lui dit : « Vous cherchez au dehors ce que vous avez au dedans. Accoutumez-vous à chercher Dieu dans votre coeur et vous l'y trouverez ». C'était le premier pas dans la voie mystique. La marche fut rapide. M Guyon pratiqua bientôt l'ascétisme, se donnant la discipline, portant une ceinture de crin, se fouettant avec des orties, mettant des cailloux dans ses souliers et de la coloquinte dans sa nourriture.
A ce régime elle perdit vite la santé ; le 20 janvier 1668, la naissance de son deuxième fils, Jean-Claude, la contraignit à un peu de repos.
A la Madeleine de la même année, elle atteint à l'état mystique ; la naissance de sa fille, Marie-Anne, le 6 février 1669, son état de faiblesse, incitent son mari à la conduire à paris, à lui procurer des distractions. Il lui fait ensuite visiter la Touraine et l'Orléanais. Ce voyage est marqué de divers incidents, qui ne sont pas sans influer sur l'état d'âme de Mme Guyon.
Les deux époux rentrent à Montargis où de cruelles épreuves les attendent ; leur fille Marie-Anne, puis leur fils ainé Jacques, puis Mme Guyon elle-même, puis le fils Armand-Claude sont atteints de la petite vérole. Armand-Claude en meurt ; ses frère et soeur et sa mère guérissent, mais Jacques et Mme Guyon sont en partie défigurés. La beauté dont elle était si fière disparait. Plus rien ne l'attache au monde; de plus en plus, elle se tourne vers Dieu.
Les événements suivent désormais leur cours. Le père La Combe passe à Montargis, se rendant à Rome. Mme Guyon le recoit quelques jours; elle se rend ensuite à Paris et fait une retraite dans un couvent de la banlieue.
Elle revient pour recueillir le dernier soupir de son père ; elle venait de lui fermer les yeux lorsqu'on la prévient que sa fille Marie-Anne, âgée de 3 ans seulement, vient de mourir subitement.
A la Madeleine suivante, Mme Guyon effectue son mariage mystique, â l'insu de son mari, qui meurt à son tour en 1676, en lui demandant pardon de ne point l'avoir comprise.
Mme Guyon est veuve à 28 ans, avec trois enfants : Jacques, déjà nommé ; Jean-Baptiste, né en 1674 et Jeanne-Marie, agée de quelques mois.
Elle subit alors une crise morale terrible. Sa belle-mère lui rend l'existence intolérable. Elle doit chercher un nouveau logement et met deux ans à le trouver. En aoùt 1678, elle achète, rue du Four-Dieu, la maison qu'occupe aujourd'hui M. Bizot. Cette maison porte le numéro 18 et l'on y retrouve maints vestiges de l'époque.
M. le Sous-Préfet indique comment, un de ses laquais ayant voulu se faire barnabite, Mme Guyon fut appelée à écrire au P. La Combe, dont elle n'avait point eu de nouvelles depuis sept ans ; comment, de la réponse qu'elle reçut, elle éprouva un soulagement ; comment, d'une autre lettre, elle déduisit que Dieu avait des desseins sur elle, et comment enfin, pénétrée de cette idée, elle refusa obstinément les riches partis qui s'offraient à elle.
Un matin, en 1681, elle quitte Montargis, cédant à l'évêque d'Aranthon qui croit trouver en elle une commanditaire matérielle et spirituelle. Elle arrive â Annecy, puis gagne le couvent de Gex. La période la plus tourmentée de sa vie s'ouvre à ce moment.
En voulant s'interposer entre le P. Garrin et l'une de ses pénitentes, elle s'attire la haine du religieux et doit quitter le couvent. Elle s'en va à Thonon où des calomnies la suivent. C'est là cependant qu'elle peut écrire le Moyen court et les Torrents spirituels. Elle fonde à Thonon un hôpital et y secourt les malheureux. Mais l'évêque d'Aranthon s'inquiète de son mysticisme; elle doit partir à nouveau, gagner Verceil, puis Turin, enfin revenir à Grenoble, quitter encore cette ville et entamer des pérégrinations qui la conduisirent à Marseille, Nice, Gênes et Verceil où elle retrouva le P. La Combe.
La veille de la Madeleine 1686, Mme Guyon arrivait à Paris. Les calomnies l'y suivirent...
Les nécessités de son exposé contraignent M. le Sous-Préfet à faire à ce moment une courte digression sur Molinos et sa doctrine : le Quiétisme. Il indique comment après avoir triomphé, Molinos fut jeté en prison. A Paris, le Père La Combe, qui avait accompagné Mme Guyon, passa pour un ami de Molinos ; dénoncé, il fut jeté en prison en octobre 1687, et Mme Guyon fut dès lors persécutée. Enfermée le 29janvier 1688, elle fut relaxée le 24 août suivant. Un an plus tard, elle mariait sa fille Jeanne qui n'avait que 13 ans, au marquis de Vaux, et vers la même époque, elle fit la connaissance de Fénelon et de Mme de Maintenon. Entrée à Saint-Cyr, Mme Guvon y apporta le mysticisme ; elle reçut l'ordre de n'y plus remettre les pieds. Fénelon, qui protégeait Mme Guyon se sentit atteint, et de l'incident germa l'affaire du Quiétisme, qui remua la France et les pays Catholiques, divisa le clergé, dressa l'un contre l'autre Fénelon et Bossuet, sema la discorde à la Cour pontificale et envenima les rapports de Louis XIV avec le pape.
M. Lesueur suit l'affaire en tous ses détails. Pour Guyon, elle se termina par une nouvelle arrestation, opérée le 27 décembre 1695. Sur l'avis de Bossuet, on l'enferma à Vincennes, d'où elle fut transférée à Vaugirard. Indigné des traitements qu'elle subissait, Fénelon fit paraitre son livre célèbre: « Explications des maximes des saints sur la vie intérieure ». Louis XIV fit condamner le livre et Fénelon dut faire sa soumission.
Entre temps, le Père Le Combe, devenu fou, avait été enfermé à Charenton, où il mourut ; Mme Guyon avait été enfermée à la Bastille ; elle ne recouvrit sa liberté qu'en 1703, le 24 mars, après huit années de détention.
Elle alla demeurer chez sou fils Jacques, à Diziers, puis gagna Blois où elle Mourut le 9 juin 1717, emportant l'estime et la vénération de tous.
M. le Sous-Préfet a parlé pendant plus de deux heures et demie; une riche documentation, un exposé clair, une diction parfaite, l'abondance des détails typiques, d'harmonieuses périodes l'ont fait suivre avec une attention passionnée, et les applaudissements qui, à maintes reprises, l'ont interrompu, éclatent d'eux-mêmes, à la fin de sa belle conférence.
II reçoit les félicitations de nombreux auditeurs, et sous l'averse qui n'a fait que redoubler de violence, chacun pressant le pas, regagne son logis.

6è Conférence.- 9 avril 1923

Le grand procès criminel devant la Cour Prévôtale de Montargis, au cours des années 1782 à 1788.

Lundi soir, à 8 heures et demie, M. H. Le Roy, avocat, secrétaire de la Société d'Émulation, a donné, salle Paul-Bert, la conférence annoncée dans notre dernier numéro.
Plus de cent auditeurs se pressaient à cette réunion. Au premier rang des assistants, nous avons reconnu Mme et M. Lesueur, sous-préfet ; MM. Ouachée, président de la Société ; le colonel Chofardet, le commandant Babuty, Me Delaporte, notaire ; le Chanoine Corcuff, MM. Crespin, conseiller municipal ; Barrier, Bonpain, Pouillot, Pétré, Moussoir, membres de la Société ; M. Briais, receveur municipal, et de nombreux membres du personnel enseignant.
M. Ouachée présente le conférencier, un Montargois connu de tous, qui fut l'avocat d'une excellente cause : la renaissance de la Société d'Emulation.
Il salue avec respect la mémoire de M. Le Roy père, membre de la société lors de sa création, qui passa sa vie à rassembler les éléments de notre histoire locale. Dans ce patrimoine, M. H. Le Roy a trouvé le sujet de maintes conférences, et notamment la matière de la causerie qu'il va donner ce soir.
Il donne aussitôt la parole au conférencier.
Dans un préambule de belle facture, M. H. Le Roy rappelle que les conférences d'histoire locale, organisées par la Société n'ont aucune prétention à être des oeuvres de science transcendante. Ce sont de simples récits. Il est bon, dit-il, que quelques membres de la Cité, versés dans l'étude du passé, en possession de documents, ou ayant simplement recueilli les traditions, prennent le soin de ne rien laisser perdre de ces souvenirs, et consentent à les transmettre à leurs compatriotes.
Il rappelle le souvenir des prédécesseurs en cette tache et rend hommage à leur bonne volonté et à leur talent. Quelques uns d'entre eux ont pu sacrifier à la légende ; il ne suivra point, cette voie, ne voulant s'appuyer, en son exposé, que sur des faits précis, indiscutables : chartes et ordonnances royales, arrêts qui sortent des greffes, expéditions dûment timbrées, apostillées et datées.
Il indique ensuite comment il a divisé son travail et comment il entend suivre son exposé dans le drame horrible, qui a répandu la terreur dans la ville et en province, dans la France entière et qui, longtemps, est resté dans la mémoire de nos anciens, sous le titre de Grand Procès.
Dans la première partie, il traitera surtout de la Geôle, dont une lithographie ancienne, collée au mur, derrière lui, représente l'aspect. La Geôle était appelée de ce nom parce que, depuis plusieurs siècles déjà, elle servait de prison. Avant cette destination, elle était porte de ville, à cheval sur la rue Dorée actuelle, entre les numéros 31 et 34, et faisait partie de la première enceinte, de cette glorieuse muraille qui, en 1427, fut le rempart de la Nationalité Française.
Jeanne d'Arc passa quatre fois sous cette porte : le 28 février 1429, allant à Gien pour se rendre à Chinon ; le 28 juin 1429, allant au sacre de Reims ; le 18 septembre de la même année, au retour du sacre, et dans les premiers jours d'avril 1430, alors qu'abandonnée par l'ingrat Charles VII, elle gagnait l'Ile de France.
L'orateur donne quelques détails sur cette première enceinte, de laquelle il subsiste encore, sur la rivière de fuite du moulin de la Pêcherie, ancien fossé de ville, une tour que M. le sous-Préfet a signalée, dans sa récente conférence, comme faisant partie de l'ancienne demeure de Mme Guyon. Une autre tour subsiste dans l'arrière-cour de la maison portant le numéro 34 de la rue Dorée. L'ancien propriétaire, M. Poncet, y a trouvé une dalle portant la date de 1414.
La Geôle était surmontée d'une tour octogonale assez élevée, le Beffroi, sur laquelle on avait placé, en 1608 (année où Henri IV vint à Montargis), une horloge dont la cloche, cassée en 1789, fut refondue l'année suivante.
L'entrée de la Geôle était à droite de la rue Dorée. M. Le Roy en donne une description, suivie d'une description intérieure qui s'étend jusqu'aux cachots, et après maints détails, en arrive au Palais royal, sis à une centaine de mètres de la Geôle, dans cette sorte d'île formée par les deux biefs des moulins de l'Étoile et de la Pêcherie.
Il fait une nouvelle description de la maison de justice dont il indique la destination au cours des siècles, puis c'est une étude approfondie des diverses juridictions de l'époque.
C'est ensuite la biographie des différents magistrats qui furent appelés à siéger au cours du Grand Procès. Tous se trouvent décrits, depuis le président Leboys des Guays, le prévôt, Pierre Guillot Desréaux, le conseiller du roi, Jean-Baptiste Payneau, les juges Étienne Ozon, Philippe-Jacques-François Coeur, Brucy de Priguet et Chesnoy, jusqu'au conseiller au bailliage Mésange, et aux avocats Édme Guyon de la Coudre, Liger de Verdigny et Philippe Martin Durzy, ce dernier homme placide et bon, qui a mérité la flatteuse épitaphe suivante :

La mort impitoyable a mis dans ce tombeau
Le meilleur des humains, l'ami le plus sincère,
Trop peu de temps, hélas! l'ornement du barreau
Pleure, pauvre orphelin, c'était un second père.

M. H. Le Roy ne fait point grâce du greffier, Rame, ni du commis greffier, Dorvet, et il ne résiste pas davantage au plaisir d'entretenir ses auditeurs de l'exécuteur des sentences criminelles, qui travaillait à un tarif que l'on estimerait, de nos jours, singulièrement réduit.
Sa dissertation sur la procédure suivie au cours du Grand Procès, est des plus intéressantes, et c'est sur ce chapitre qu'il termina la première partie de son exposé.
Après un instant de repos, il aborde le procès en lui-même.
En 1780, une bande nombreuse de voleurs et d'assassins infestaient la France. La maréchaussée de Malesherbes ayant arrêté son chef, Charles Hulin, et sa concubine, Adélaide Démon, on constitua le bailliage de Montargis en cour prévôtale, afin d'éviter d'énormes frais de procédure, pour juger 225 individus de cette bande, arrêtés à diverses dates et venus successivement de diverses prisons du royaume, sur les révélations faites par Hulin et la Démon, ainsi se surnommait sa concubine. Les accusés furent donc amenés à Montargis de tous les points de la France, et la Cour prévôtale commença à rendre ses arrêts le 7 octobre 1782.
M. Le Roy fait lecture des pièces officielles de l'époque, et notamment de l'arrêt du Conseil d'Etat du Roi qui saisit la juridiction criminelle de Montargis, puis il donne une impression générale sur lés criminels et la nature de leurs crimes. Tous ces gens étaient des vagabonds, sans profession véritable, et tous avaient des noms de guerre. Ils étaient coupables des vols les plus divers et fréquemment, en leurs cambriolages, ils se servaient de coutres de charrues. Le cas était si fréquent qu'il retint l'attention, et notre Code pénal actuel, article 471, paragraphe 7, punit, en souvenir de ce procès, d'amende et de prison en cas de récidive, le cultivateur qui laissé en ses champs les coutres de charrues, pinces, barreaux, dont sont susceptibles de se servir les voleurs.
Ces voleurs attaquaient les voyageurs sur les routes, tuaient à l'aide de pistolets, brûlaient le visage de leurs victimes avec des torches, opéraient de préférence la nuit, s'introduisant dans les maisons par le toit ou par les cheminées. Beaucoup d'entre eux étaient marqués sur l'épaulé des lettres G. A. L. (galériens) ou de la lettré V (voleur).
Ceux d'entre eux qui furent convaincus d'assassinats furent rompus vifs ; ceux qui bénéficièrent de présomptions moins fortes, furent pendus ou envoyés aux galères ; des peines moins sévères furent infligées aux simples voleurs. En résumé, il en fut condamnés 51 à la roue ; 1 fut brûlé vif, 61 furent pendus, 12 furent envoyés aux galères, 2 furent condamnés au fouet ou à la marqué, 1 s'évada, 21 moururent en prison et 64 furent renvoyés de l'accusation.
L'orateur coupe son récit de diverses anecdotes et consacre un chapitre spécial au récit de l'exécution de l'un de ces criminels.
« Le supplice de la roue consistait, dit-il, à étendre le condamné sur un double tréteau disposé en croix de Saint-André sur les bras desquels des entailles assez profondes étaient pratiquées en vue de rendre plus certaines les fractures des quatre membres que l'exécuteur provoquait à coups de barres de fer. Un dernier coup brisait les reins. Puis le patient était attaché sur une roue de brouette et exposé jusqu'à la mort. L'exécution avait lieu sur l'actuelle place de la République, place du marché, et le samedi, jour où il y avait le plus de monde ; les restes étaient ensuite portés hors la ville, sur la rivé de la forêt, en face de la paroisse de Châlette. En 1859, lors des travaux de construction de la ligne P. L. M., on a retrouvé à cet endroit, sept ou huit squelettes de suppliciés.
M. Le Roy fait encore le récit d'une erreur judiciaire de l'époque et le récit de l'évasion tragique d'un des criminels, un nommé Martinet, dit le Grêlé, que rejoignit à Douchy le cavalier Billecoq, de la maréchaussée de Montargis.
Ce Martinet, un sacripant de la pire espèce, avait opéré, entre autres méfaits, un vol à Lorris, au préjudice de Pierre Leturcq, marchand tailleur, près la halle ; avec ses complices, il enleva une telle quantité d'indiennes, qu'il fallut atteler la voiture de deux chevaux.
Mais, à reprendre tous les détails de cette conférence, nous sortirions du cadre qui nous est imposé et qui est des plus restreints.
Notons donc, simplement, que l'exposé de M. Le Roy, si intéressant à divers titres lui valut; à sa conclusion, de vifs applaudissements.
Cette conférence est la dernière de la saison.
Quittant en effet le rôle de conférencier pour reprendre celui de secrétaire de la société, M. Le Roy l'annonça ainsi. Les conférences seront reprises au début de l'hiver. La Société compte sur de nombreux concours, et comme, pour ses recherches et achats de documents, il lui faut aussi de l'argent, M. H. Le Roy fait un appel pressant auprès des personnes qui s’intéressent au passé de notre cité pour qu'elles veuillent bien s'inscrire comme membres honoraires.
A dix heures et quart, M. Ouachée lève la séance.

26è Séance. - 15 mars 1923

Jeudi 15 mars, la Société a tenu sa séance ordinaire en la salle de la Bibliothèque municipale sous la présidence de M. J. Pouillot, vice-président. Etaient présents : MM. Barrier, Gourdin, Ch. Nouguier, Bonpain, Moussoir, docteur Clergeau, Voisin, Pétré et Le Roy. S'étaient excusés : MM. Ouachée, chanoine Corcuff et . Mailfert.
Sur la demande de MM. Ouachée et Corcuff, la discussion sur l'étymologie du mot Montargis est renvoyée à une séance ultérieure. Néanmoins, M. G. Barrier dit qu'à la suite des communications parues dans la presse parisienne, il a reçu deux lettres fort intéressantes de M. le comte de Fouchères à Paris. Ce correspondant se range à l'opinion de M. Lorgnon, qui confirme celle de dom Morin (et d'Adrien de Valois) et fait dériver notre étymologie d'un nom d'homme Franc.
M. Ch. Nouguier fait une très complète analyse des cahiers de la noblesse du Bailliage de Montargis aux États Généraux de 1789, qu'il conviendrait de publier en entier. Dans un premier titre, les membres de l'assemblée demandent le maintien de la loi Salique et l'établissement de la monarchie constitutionnelle ; aucune entrave à la Liberté individuelle ; l'inviolabilité des députés, sauf l'autorisation des poursuites par l'assemblée ; responsabilité du juge en cas d'arrestation arbitraire ; la liberté de la Presse ; l'inviolabilité de la propriété, sauf expropriation pour cause d'utilité publique ; le retour périodique (5 ans) des Etats Généraux ; leur convocation en temps de guerre ; que les deux ordres, noblesse et clergé, soient réunis en un seul, avec 1100 représentants : que les communes des villes, Tiers-Etats, en aient 300 et que un nouvel ordre, sous le titre d'ordre des Campagnes soit créé avec 300 représentants ; les Etats exposeront les maux de l'Etat ; voteront les lois sous la sanction du roi ; voteront les contributions, impositions et emprunts. Le pouvoir législatif résidera essentiellement en la personne du roi. Les responsabilités ministérielles devant les états en matière financière, aucun impôt ne peut être perçu sans leur vote. Faculté d'aliéner les domaines du Roi, suppression des ordres mendiants et monastiques avec pensions suivant l'âge, perçues sur le produit et la vente de leurs biens. Pas de mesures d'exception contre les non-catholiques. Toute personne, de quelque qualité et condition qu'elle soit, doit payer en raison de sa propriété. Fixation sur un état des effectifs des budgets de la guerre et de la marine. Libre commerce et circulation des grains ; précautions contre les accapareurs. Que l'instruction des procès criminels soit publique ; que l'accusé ait un conseil. La peine de mort supprimée, sauf le cas d'homicide volontaire ; pas d'exécution sans la signature personnelle du Roi. Réparation en cas de prison ou exécution en vertu d'un jugement erroné. Refonte de l'ensemble des lois civiles. Empêcher la longueur des procès. Amende sur les plaideurs inconsidérés, etc. etc. Mandat impératif aux représentants, pouvoirs limités à 1 an.
L'assemblée a été tenue à Montargis, le 22 mars 1789. Le procès-verbal porte 44 signatures. Les commissaires sont MM. Rogres, marquis de Champignelles ; le Mayre de Charmoy, le marquis de Montigny, Fougeret, le comte de Mithon, Gislain, baron de Bontin, de Portelance, de Birague d'Apremont secrétaire ; le comte de la Touche-Tréville, président.
M. le docteur Clergeau dépose à la Bibliothèque un très beau moulage (grandeur naturelle) de la partie centrale du tympan de la porte de l'ancienne église de Cortrat. On reconnaît la valeur artistique de ce curieux document. Chacun propose d'ingénieuses réflexions sans qu'on puisse nettement s'arrêter à fixer l'âge de cette sculpture. M. Le Roy attire l'attention de ses collègues sur les orbes réguliers où on pourrait admettre comme la matérialisation du vent ou de l'air. On retrouve des dessins analogues sur des monuments celtiques gravées par exemple, les pierres sculptées de Gavrinnis (Morbihan). M. le Docteur Clergeau admet ce rapprochement et cite d'autres sculptures semblables d'époques très reculées.
Une communication de M. D. Blanche sur la nomination de trois députés de Saint-Maurice-sur-Fessard à l'assemblée du Bailliage de Nemours du 1er mars 1789, sera faite à la prochaine réunion. La séance est levée à 18 h. 30.

27è Séance. - 12 avril 1923

Jeudi 12 avril 1923, la Société a tenu sa séance ordinaire en la salle de la Bibliothèque municipale, sous La présidence de M. J. Ouachée. Étaient présents : MM. Pouillot, Barrier, Bonpain, Ch. Nouguier, chanoine Corcuff, D. Blanche, abbé Crespin, F. Pétré et H. Le Roy. M. R. Gourdin s'était excusé.
M. le chanoine Corcuff avait bien voulu accepter la mission de se rencontrer au Congrès annuel dés Sociétés Savantes, à la Sorbonne, avec les trois savants, qui ont donné leur opinion dans des communications faites à la presse de Paris au sujet de l'étymologie du mot Montargis. Il a pu se rencontrer avec M. Marichal, conservateur des Archives Nationales et M. le commandant Lalance, membre de la Société historique de Nancy. M. le comte de Fouchère n'a pu se trouver au rendez-vous ; d'ailleurs, ce dernier adopte l'opinion de M. Marichal. Dans un rapport oral, M. Corcuff expose avec une clarté et une précision parfaites le résultat de ses entrevues. Il a trouvé MM. Marichal et Lalance absolument fermes dans leurs théories. M. Lalance tient pour le caractère topographique et le radical celtique Arg, signifiant Blanc. M. Marichal pour l'origine franque, le nom d"homme Artgisus, qui au VIè siècle est, d'après son savant collègue feu Auguste Longnon, l'origine du mot Montargis. M. Lalance a appris avec une vive satisfaction que le sol de la colline du Château de Montargis est d'origine crétacée, c'est-à-dire blanc, aussi est-il plus intransigeant que jamais, surtout lorsqu'il apprit que Nargis, à 10 km. De Montargis, est dans des conditions identiques. M. Marichal cependant, a laissé entendre qu'il s'en rapporterait à l'opinion, qui offre toute garantie, celle qu'exprimera prochainement M. Soyer, le savant archiviste du département du Loiret. Notre compatriote prépare en effet un ouvrage sur les noms de lieu de la région orléanaise, et aura l'occasion de mettre en valeur tous les documents qui sont en sa possession sur ce sujet. M. Corcuff est vivement remercié.
M. le Roy dit que ce qui fait la difficulté de cette question, est de satisfaire à ce mot Argis, qui pullule sur otre territoire et même au dehors ; il cite de mémoire Argis dans L'Ain, Auffargis (S.-et-().), Pontargis (Yonne), Argicourt (Aisne), Nargis (Loiret), Argilly (Côte-d'Or) Blargies (Oise) Argien (Ariège), Hargeville (S.-et-O.), Montharville (E.-et-L.) et les noms de seigneuries Fargis, Argis en Touraine, enfin Argis en Roumanie.
M. Pouillot, qui est en relation personnelle avec M. l'archiviste Soyer sollicitera de lui quelques éclaircissements.
M. D. Blanche fait ensuite une intéressante communication sur La délégation des habitants de Saint-Maurice-sur-Fessard à l'Assemblée du bailliage de Nemours. Il constate par le petit nombre de ceux qui savent signer combien il y avait peu alors d'instruction dans les campagnes. Il constate que la préoccupation de tous vise la réduction des impôts de toutes sortes, la conversion des dixme en impôt proportionnel. On demande le soulagement des pauvres, du travail assuré pour tous. Quant aux affaires diplomatiques et aux questions constitutionnelles, cela ne les touche pour ainsi dire pas. Ils n'y comprennent rien.
Dupont de Nemours et Berthier furent élus députés.
M. Pétré donne lecture d'un projet dit à l'initiative de M. Fourrier-Sarlovèze, maire-député de Compiègne. Il s'agit de rompre pour une fois avec les organisations de tournois historiques et leur remplacement dans l'organisation de fêtes publiques par des parties d'échecs avec pièces vivantes. Naturellement, les personnages sont revétus de costumes anciens. M. Pétré insinue que peut-être cette idée pourrait séduire les organisateurs de fêtes au Stade montargois.
La séance est levée à 18 h. 30. Prochaine réunion le 26 avril.

28è Séance. - 26 avril 1923

Le jeudi 26 avril 1923, la société s'est réunie en séance ordinaire, en la salle de la Bibliothéque municipale, sous la présidence de M. J. Ouachée. Etaient présents ; MM. J. Pouillot, chanoine H. Corcuff, Ch. Delaporte, G. Barrier, D. Bonpain et H. Le Roy. Etaient excusés : MM. F. Pétré, comte de Sartiges, comte Frémy.
En ouvrant la séance, M. le Président donne lecture de la lettre suivante qu'il vient de recevoir de M. P. Baudin, président d'honneur de la Société :

« J'ai le plaisir de vous informer que le Conseil général du Loiret a voté une subvention de 200 fr. en faveur de la Société que vous présidez.
« A cette occasion, j'ai d'ailleurs constaté que vos travaux étaient suivis par bon nombre de mes collègues au Conseil général, qui en apprécient beaucoup l'intérêt et m'ont chargé de vous transmettre leurs bien vives félicitations.
Permettez-moi d'y joindre les miennes, en y ajoutant l'expression de mes sentiments les plus dévoués à votre oeuvre et à tous les membres de la Société d'Emulation.
«  Signé : P. BAUDIN. »

M. le Président donne lecture de la lettre de remerciements qu'il va adresser à M. Baudin, qui a bien voulu se faire notre interprète et présenter notre requête à l'assemblée départementale. Cette lettre sera adressée avec l'approbation générale des membres de la Société.
D'autre part, M. le Trésorier fait connaître que cinquante membres honoraires se sont déjà fait inscrire et que les cotisations sont encaissées par lui. Une deuxième liste est en recouvrement.
M. le Sous-Préfet, président d'honneur, a fait parvenir au président copie des documents tirés des archives départementales, donnant la désignation de la maison occupée en 1648 par le père de Mme Guyon, rue de Loing, 28, et des deux autres maisons, 16 et 18, rue du Four-Dieu, que cette femme célèbre a habité pendant la durée de son mariage et une partie de son veuvage. M. Lesueur avait, lors de sa conférence, cité pour le premier immeuble la référence A. 360, p. 69, et pour les 2è et 3è, A. 369, p. 132, archives du Loiret.
M. G. Barrier donne ensuite lecture d'une communication des plus intéressantes sur la première partie d'un historique du canal de Briare, ou mieux comme on disait alors, du canal de Loire en Seine. Ce travail est dû à M. Lébe-Gigun, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées (annales des P. et Ch. 1889).
Le canal de Briare est le premier des canaux à point de partage, dit-il, qui ait été construit, et cet ouvrage mérite de fixer l'attention des ingénieurs, par le grand progrès qu'il a marqué dans leur art et par la gloire qui en revient à la France.
Hugues Crosnier, qui a construit le canal jusqu'aux cinq sixièmes, peut-être considéré comme le véritable auteur de ce magnifique travail et on doit le compter au nombre des grands ingénieurs.
C'est le grand ministre de Henri IV, Sully, qui en eut l'idée première. Les travaux commencèrent en 1604. Henri IV et Marie de Médicis vinrent à Montargis en 1608 pour visiter les travaux.
Jusqu'alors, les produits des provinces du bassin de la Loire devaient être transportés par voie de terre de Briare à Montargis, pour descendre sur Paris par le Loing, qui était navigable au moyen de pertuis depuis notre ville. L'industrie de la navigation était très florissante alors à Montargis.
Mais la mort de Henri IV (1610) et la disgrâce de Sully, entravèrent l'exécution de cette entreprise. Crosnier mourut avant son achèvement. Suspendus en 1611, les travaux ne reprirent qu'en 1638, et en 1642, les premiers bateaux passèrent de Loire en Seine.
M. Barrier, dans une deuxième communication, parlera de la reprise de l'entreprise par Boutroux et Guyon.
M. Le Roy donne ensuite lecture d'une note sur le très antique château de la Salle, sis au milieu du Buisson de Paucourt. Nous donnons cette note en appendice au procès-verbal.
La séance est levée à 18 h. 30.

Note de M . Le Roy : Château de la Salle

Voici l'époque favorable pour faire une agréable excursion en forêt, an château de la Salle. Si des maisons de gardes forestiers dites de Saint-Dominique, nous pénétrons en forêt par la route de Paucourt jusqu'au poteau de l'Etoile et que prenant sur la droite la route de la Réserve jusqu'à sa rencontre avec la route des Muzets, au carrefour du Marchais-Blanc, nous aurons parcouru 5 petits kilomètres. Prenons à gauche la route des Muzets, dans la direction de Paucourt. A peine aurons-nous parcouru 3 à 400 mètres, nous sommes arrivés. S'il n'y a pas encore trop de feuilles, sur la gauche on perçoit du chemin quelques petits mouvements de terrain. C'est l'emplacement du très ancien château de la Salle, ainsi nommé de la grande salle qui s'y trouvait.
Un ancien officier du 82è a eu l'obligeance d'en relever le plan que voici. C'est un grand quadrilatère ou mieux un parallélogramme exactement orienté. Les deux grands côtés regardent le Nord et le Sud ; les deux petits côtés l'ouest et l'est. L'entrée est au midi. On remarque l'emplacement de 4 tours aux 4 angles. D'anciens fossés se voient encore, mais plus une pierre. Une rigole qui traverse la route de la Réserve où nous sommes passés, alimente l'étang dit de Paucourt. Auprès se trouve une Maison bourgeoise décorée du nom de château de Paucourt. Le site n'offre rien de particulier, pas d'accidents de terrain.
Dom Morin, page 84 de son Histoire da Gastinois, écrit :
« Paucourt est un village très ancien et qui témoigne de son antiquité auparavant la naissance de Montargis. II est situé à une lieue d'icelle, proche la forest qui est appelée de son nom Paucourt et à présent (1628) nommée forest de Montargis.
Là se voyent encore quelques vestiges d'un ancien château qui se nomme la Salle, très ample et fort antique, auquel les Rois et les Princes prenaient leurs délices, s'exérçant en ces quartiers-là au plaisir de la chasse. Ce Chasteau fut basty par un nommé comte Perron qui estait seigneur de toute la forest de Paucourt. Il se trouve même quelques chartes par lesquelles il donne aux habitants de Paucourt le droit de chauffage en icelle forest.
Or, ce château est nommé la Salle, non sans raison : car en iceluy, il y avait une grande, spacieuse et magnifique salle qui se voyoit encore en son entier en l'an 1403. Tesmoin une charte en date de cette année-là, donnée par Charles VI (ou Isabeau) donnée en la dite salle du chàteau de Paucourt, laquelle est en notre Abbaye de Ferrières.
Isabelle, Royne de France, espouse du Roy Charles VI et fille d'Etienne Duc de Bavière, confirma le même droit de chauffage auxdits habitants de Paucourt avec usage en la forêt de Montargis au bois appelé St-Liger en bois mort, et mort bois, et leur donna le pasturage pour leur bestail, à la charge que lesdits habitants feraient tous les ans célébrer un annuel pour le feu comte Pierron. La Charte fut donnée à Paris, le 26 octobre 1403, et outre ce leur estait payé annuellement par le Receveur du Domaine, 50 sols dont se rendait compte à la Chambre, ce qui se pratique encore aujourd'hui ».
D'autre part, l'abbé Patron, T. II, p. 36, attribue à Saint-Louis la construction du château de la Salle : c'est là que le saint roi venait se reposer avec la reine Blanche de Castille, sa mère. Nous sommes donc à une date antérieure à 1227; date de l'avènement de saint Louis.
Le château de la Salle était appelé aussi, sans doute, à cause en ce séjour, château de la Reine Blanche.
Quant aux séjours de Rois de France, M. Thoison, dans son ouvrage, publié par la Société Historique et Archéologique du Gàtinais, cite :
Séjours des Rois : Paucourt
Philippe IV ( le Bel)
1301 : 19 juillet, 16 et 14 décembre.
1305 : x juillet, x octobre.
1308 : 31 décembre.
Le 31 décembre 1308, Philippe IV vint diner au château de Montargis et en repartit le lendemain, pour aller coucher au château de la Salle, situé en la forêt de Paucourt (le Buisson de Paucourt alors).
Ce château fut très anciennement bâti par un seigneur du Gâtinais, nommé Péron. Ce lieu devint une maison royale lorsqlue la forêt fut réunie au domaine de la Couronne. (Est-ce en 1180 ?)
1309 : 1er janvier au 3 janvier, x juin.
1310 : 6 janvier, 21, 23 oct., x déc.
1312 : x avril, x mai.
1313 : x janvier, x juillet.
1314: x février, x juin.
Louis X (Le Hutin)
1316 : x avril.
Philippe VI (de Valois)
1336 : l8 novembre.
1341 : 9, 1l ,juillet.
1349 : 9, l6 juin.
Charles VI (1380-1422) : (1392 démence):
1392 : 11 novembre, x décembre.
Philippe IV passa au château de Paucourt les trois premiers jours de janvier 1309, avec toute la jeune noblesse de la Cour. Ce séjour fut une suite continuelle de fêtes et de plaisirs que le roi savait allier aux soins des plus importantes affaires.
Ce fut pendant ce voyage que l'on découvrit la fourberie de quelques aventuriers qui fit rire le roi et toute la cour aux dépens de quelques dames qui furent dupes de leur simplicité ou du libertinage commode de ce bon vieux temps.
Des aventuriers flamands couraient la France sous un extérieur simple en répandant le bruit que le comte d'Eu, Godefroy Brébant, Jean de Brébant son fils, seigneur de Vierzon et plusieurs autres gentilshommes qu'on croyait tués à la bataille de Coutroy (11 juillet 1302) avaient échappé miraculeusement au carnage de cette malheureuse journée, qu'en reconnaissance d'un si grand bienfait, ils avaient fait voeu d'errer pendant sept ans sous l'habit de pauvres par toute la France demandant, l'aumône et cachant leur état à tout le monde, méme à leurs familles. Que ce voeu expiré, ils se rendraient à Boulogne-sur-Mer et découvriraient le secret de leur naissance. On crut en reconnaître quelques-uns à certaines marques. II ne fallut pas davantage pour renverser les têtes de plusieurs personnes des deux sexes.
Toutes les maisons leur étaient ouvertes, partout ils étaient comblés d'honneur. Quelques dames imaginèrent ou feignirent d'imaginer quelques traits de ressemblance avec leurs défunts maris ; elle se livrèrent à celte idée séduisante et portèrent la complaisance jusqu'à les recevoir dans leur lit. La fourberie se découvrit enfin et elles devinrent la fable de la cour de la ville et du peuple.

29è Séance. - 17 mai 1923

Jeudi 17 mai 1923, à 17 heures la Société a tenu sa séance ordinaire en la salle de la Bibliothèque municipale, sous la présidence de M. J. Ouachée. Etaient présents : MM. J. Pouillot, G. Barrier, D. Bonpain, R. Gourdin, abbé Crespin, P. Moussoir, F. Pétré et H. Le Roy ; excusé, M. le comte de Sartiges.
A l'occasion de la mort de M. G. Pallain, M. Le Roy rappelle que, comme délassement à ses importantes charges, l'ancien gouverneur de la Banque de France présidait depuis de longues années, la Société Historique et Archéologique du Gâtinais. Il est décidé que le M. Président de la Société d'Emulation présentera, en notre nom, nos condoléances à la famille de notre compatriote, qui va reposer à Gondreville.
M. G Barrier aborde la deuxième partie de son résumé sur les Origines du canal de Briare, qu'il intitule : « Guillaume Boutheroue, Jacques Guyon et les Seigneurs du Canal ». II dit remarquer que c'est au 17è siècle que furent créées en France les premières sociétés ayant pour objet des travaux d'utilité publique.
Crosnier était a la fête d'une de ces sociétés lorsqu'en 1604, il devint adjudicataire du Canal de Loyre en Seine, comme on a d'abord désigné le Canal de Briare.
Le marquis d'Effiat, seigneur de Briare, devint surintendant des Finances. Le 18 avril 1628, il chargea les sieurs de Fourcy, surintendant des Bâtiments ; Francini, intendant des Fontaines, et Lemercier, architecte, de rechercher les moyens de ne pas laisser improductives les premières dépenses de cet important ouvrage, abandonné depuis la mort de fleuri IV et la défaveur de Sully. Le 22 février 1629, Crosnier entreprit d'alimenter le bief de partage ou « Grand canal de la montagne », au moyen d'une rigole amenant les eaux du Loing. Mais il meurt sans avoir exécuté les travaux. Par une nouvelle ordonnance du 6 mars 1660, le sieur de Fourcy, avec d'autres experts : Francini, Lemercier, Tivier, Monaco et Roulx, sont chargés de continuer l'examen des travaux. Ceux-ci adoptent une solution moins bonne : « La rigole de Saint-Privé ». Techniquement, la question de l'achèvement du canal était résolue. II fallut attendre cinq années encore pour résoudre la question d'argent. Ce furent Guillaume Boutheroue et Jacques Guyon (père du mari de la célèbre Mme Guyon), receveur des Aides et payeurs des rentes dans les élections de Montargis et de Beaugency, qui résolurent le problème financier. Ce fut d'ailleurs une magnifique entreprise financière, administrée d'une manière hors ligne. Cette Société, qui comptait trente parts, conserva ses statuts de l'origine jusqu'en 1860, époque à laquelle l'Etat a racheté le canal. Repris en 1638, les travaux furent achevés en 1642.
Les lettres-patentes de décembre 1642 Constatent que : « Courageusement entrepris par quelques particuliers de nos sujets qui se sont unis et associés, malgré le temps de guerre..., ils l'ont mis à perfection, à leurs propres coûts et dépens, sans qu'il ait été fait aucune levée ni imposition sur nos peuples... et que les bateaux venus de Roanne, d'Auvergne, de Tours, d'Angers.., ont abordé à Paris avec grande joie et admiration d'un chacun ».
En 1682, on commenca le canal d'Orléans qui, livré en 1692, vint faire une concurrence redoutable au canal de Briare.
C'est en 1729 que fut concédé le canal du Loing. Jusqu'alors, le Loing était navigable au moyen de 28 pertuis. En 1840, le produit du canal était de 300.000 francs. Les dépenses administratives étaient de peu d'importance, la stricte économie était la règle.
M. Barrier est vivement remercié de son très clair et très instructif exposé.
M. J. Ouachée fait remarquer combien cette importante artère offre d'intérét, au point de vue économique, commercial et industriel, à ce point central qu'occupe notre ville de Montargis. II souhaite que les pouvoirs publics, les financiers et les commerçants y attachent de l'importance plus que jamais.
M. Bonpain fait ensuite une communication au sujet de trois plans de la ville d'Orléans, remis à la Société par un généreux Montargois. Le plus intéressant des trois, qui mesure 0 m. 68 c. X 0 m. 52 c. est dédié au cardinal du Cambout de Coislin évêque d'Orléans. C'est donc une oeuvre qui date de 1690 à 1706. L'exécution en est très soignée. La Loire est sillonnée de bateaux et barques de toutes sortes, les uns à voiles, les autres à roues mues par l’Homme, ou à rames. La signature du graveur est : Incelin.
Le second plan (de 0.21 X 0.15) a été gravé par un allemand. On y lit, en majuscules, le mot AUGSPURG. Le notre du graveur parait être Stridbeck. C'est, peut on croire, une réduction du premier plan, et qui lui serait postérieur.
Le troisième est un plan manuscrit, signé F. Labruère, et est daté de 1790. Les améliorations et constructions nouvelles sont bien indiquées. Ainsi, celle du nouveau pont, dù à l'architecte Jean Hureau, inauguré par Mme de Maintenon, ce qui fit dire qu'il était d'une solidité à toute épreuve puisqu'il avait porté le plus lourd fardeau de la France. Des soins particuliers assureront la conservation de ces trois plans.
Sur la demande de M. l'abbé Crespin, la recherche des souvenirs montargois concernant Jeanne d'Arc, est mise à l'ordre du jour.
La séance est levée à 19 heures. Prochaine réunion le jeudi 7 juin.

30è Séance. - 7 juin 1923

Jeudi 7 Juin 1923, à 17 heures, la Société a tenu sa séance ordinaire en la salle de la Bibliothèque municipale, sous la présidence de J. Ouachée. Etaient présents : MM. J. Pouillot, G. Barrier, D. Bonpain, abbé Crespin, Ch. Nouguier, F. Pétré et H. Le Roy. Excusés : MM. R. Gourdin et P. Moussoir.
M. le Président adresse les félicitations de la Société à notre collègue,. M. Jean Viot, de Chàtillon, qui vient de recevoir les palmes d'officier d'académie. On prononce ensuite l'admission, comme membre titutaire, de M. Midol père, présenté par MM. Bonpain et Le Roy.
On aborde l'enquête ouverte à la demande M. l'abbé Crespin, sur la recherche des Souvenirs Montargois concernant Jeanne d'Arc. Notre collègue dit que la tradition admet quatre passages de Jeanne d'Arc à Montargis ; en allant à Chinon (février 1429), en se dirigeant sur Reims (juin 1429), en revenant du siège de Paris (septembre 1429) et en repartant combattre à Melun et Compiègne (avril 1430). Il lui semble que le troisième passage est le seul certain.
M. Le Roy fait remarquer que ceux qui ont écrit sur notre histoire locale sont tous muets au sujet de Jeanne d'Arc : Dom Morin ne l'a pas nommée au cours des 838 pages de son texte ; Pelée de Varennes, ni plus tard Boivin, ni nos prédécesseurs de la Société d'Emulation de 1854 à 1874 n'ont parlé de Jeanne d'Arc. Le manuscrit de Hureau de Livoy relate la vieille tradition populaire du séjour de la Pucelle à la Pothonnerie, c'est tout. Cependant, on doit citer le très intéressant « Itinéraire de Jeanne la Pucelle », publié en 1894 par l'ancien curé Saint-Germain-des-Prés, l'abbé Casimir Rouette, qui, notamment sur le second passage, est très précis. Il est d'accord en cela avec le chanoine Cochard et avec Anatole France.
C'est à Montargis que Charles VII vint rejoindre Jeanne d'Arc avec un brillant cortège et les 12.000 hommes de l'armée rovale. Le 29 Juin 1429, quel dut être l'enthousiasme des Montargois, les vainqueurs du 5 septembre 1427, à revoir leurs anciens chefs Dunois, La Hire, Pothon de Xaintrailles et Jeanne d'Arc, dans toute la joie de sa glorieuse mission, au lendemain de la délivrance d'Orléans, à la veille du Sacre de Reims. L'enquête sera continuée à la prochaine séance.
M. le Président donne communication d'une lettre de M. le Maire de Montargis qui transmet à la Société une demande de renseignements au sujet de l'ancienne horloge du Château. Par une curieuse coïncidence, M. le Président a reçu de M. Charreyre, directeur du Gâtinais, des documents reçus d'un de ses abonnés, sur le même sujet.
M. Le Roy dit que, vraiment, la question est à l'ordre du jour, car, troisième coïncidence, M. Collet, de notre ville, lui a fait demander sur ce même sujet, il y a quelques semaines, des renseignements qui ont fait l'objet d'une note qui est déjà transmise à l'intéressé, M. Ungerer, directeur d'une fabrique d'horloges d'édifices, à Strasbourg et chargé de l'entretien de la célèbre horloge de la cathédrale. On trouvera cette note en annexe au procès-verbal.
M. G. Barrier donne ensuite lecture d'une communication relative à un Plan du Pâtis de Montargis, dressé en l'an VIII de la République. Notre collègue est vivement remercié de son travail, qui sera également publié en annexe.
La séance est levée à l9 heures.

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 juin 1926 ; note de M. H. Le Roy

LA VIEILLE HORLOGE DU CHÂTEAU DE MONTARGIS

Messieurs,
M. le Maire de Montargis a transmis au président de notre Société une lettre qu'il a reçue de MM. J. et A. Ungerer, fabricants d'horloges d'édifices à Strasbourg. M. le Maire nous prie de donner satisfaction aux signataires dans la mesure où cela nous serait possible. II y a quelques semaines déjà, j'avais été sollicité par ces mêmes correspondants par l'entremise de M. Collet, horloger de notre ville, auquel j'avais remis les quelques renseignements qui font l'objet de cette note.
MM. Ungerer veulent publier une notice sur les anciennes horloges françaises remarquables. Ils ont lu dans un traité d'horlogerie que sur l'une des tours du château de Montargis « était installée une horloge accompagnée de statuettes-automates frappant les heures sur une cloche ». Ces messieurs demandent quelle est l'année de la construction de l'horloge ? Quel en est l'auteur ? Quelles ont été les transformations ? Si elle a cessé de fonctionner? Et, dans ce cas, quelle est la date de l'arrêt ? Que sont devenus mécanisme, statuettes, cloche ?
Nous serons muets sur plusieurs points. Nous pensons bien, cependant, que le grand public nous viendra en aide et que, grâce à lui, nous allons retrouver quelques reliques de cette horloge historique.
Historique, en effet, Cette horloge avait été placée sur l'une des tours - la plus haute au nord du pignon de la grand'salle - de notre célèbre château, par Charles V, en 1380. C'était la seconde grosse horloge, qui avait été construite en France. La première avait été élevée à Paris, au Palais de la Cité, sur la Tour du bord de l'eau, en 1370, par ce même monarque.
C'est la première fois que nous entendons dire, à propos de notre vieille horloge, que des statuettes automates frappaient les heures. Au reste, on peut voir dans les galeries de notre musée municipal, une très ancienne gravure tirée des oeuvres d'Androuet du Cerceau : Les plus excellents bâtiments de France, dont la première édition est de 1576. On remarque dans l'intérieur du campanile une cloche, et une élégante girouette la surmonte mais on n'aperçoit aucune statuette. Il est vrai que déjà 200 ans se sont écoulés. Plusieurs sièges violents ont certainement causé des dommages : surtout celui de 1427, que nos pères ont fait lever à leur éternel honneur ! Et puis, les remaniements du grand bâtisseur, Charles VII et de Charles VIII qui construisit notamment le grand escalier, non loin précisément de cette tour de l'horloge, ont apporté bien des modifications au cours de ces deux siècles. J'avancerai cette opinion que, peut-être, comme à Strasbourg, l'horloge et ses statuettes se trouvaient â l'intérieur de la grand'salle et la sonnerie à l'extérieur au sommet de la tour. A l'appui de cette opinion, on remarquera que sur cette gravure de 1576, on n'aperçoit pas trace de ce cadran carré, dont nous allons parler par la suite.
Nous avons adressé à nos correspondants, six ou sept extraits d'ouvrages d'érudition locale plus que centenaires, qui se répètent paresseusement les uns les autres. Il serait fastidieux de les reproduire, quoique chacun contienne un détail nouveau (ou une erreur). Nous avons cité Dom Morin (Histoire du Gâtinais), 1628, page 16 ; Hureau de l'Yvoi, auteur d'une notice publiée en 1766 dans le deuxième volume des Recherches sur ta France et reproduite par Léorier de l'Isle, l'ancien directeur des célèbres papeteries de Langlée et de Buges en 1784, dans les Loisirs des bords du Loing ; deux bons articles de la Grande Encyclopédie du 18 siècle, de Diderot, 1778 ; le Manuscrit de Boivin, écrit vers 1830, le Magasin Pittoresque, T. VII, 1838, p. 512.
Je transcrirai seulement la note insérée dans Le Journal de l'Arrondissement de Montargis (Lequatre, imprimeur), du 25 mars 1810. C'est à celle date que commencèrent les travaux de démolition du château. La dernière tour, celle de l'horloge, est tombée en 1837, le jour même où les 1.000 francs qui devaient en assurer la conservation, venaient d'être recueillis par souscription. Le reporter d'alors rectifie les textes précédents. Il y a lieu de le croire, puisqu'il était à pied d'œuvre.
« La cloche du château vient d'être descendue. Elle y avait été placée par Charles V, dit le Sage, roi de France, dans la tour flanquée sur l'angle septentrional et la plus élevée de celles qui entourent le château.
« La note de Dom Morin est inexacte quant à l'inscription. La voici textuellement :

Charles le Quinct, roi de France,
Aux heures povr remembrance
Et povr avis
Faire un fict
Par J. Jovvente
L'an mil ccc. cinquante et trente

« Ces huit vers ou plutôt lignes rimées dans le style lapidaire et dans la forme de toutes les inscriptions à cete époque, sont compris entre deux lignes tracées au pourtour de la cloche dans sa partie supérieure et au point où sa forme se retire brusquement vers les oreilles. Ce mème point forme par là le sommet d'un angle presque droit, qui donne à la cloche un aspect aplati dans son sommet et la rend fort différente de toutes celles qui sont plus récentes.
« La netteté des caractères, des croix, des fleurs de lys, qui séparent les mots et les périodes de l'inscription et lui tiennent lieu de ponctuation, le beau poli et la douceur de la matière de cette cloche qui n'offre à la vue ni au toucher aucune rugosité, bouillon, ni cavité, prouve et l'habileté du fondeur et le soin qui a été apporté au choix des métaux qu'il a employés ».
Nous possédons une lithographie, due au crayon de notre compatriote A. R Ravault, l'élève et l'ami de notre illustre peintre Girodet-Trioson, qui porte cette mème date de 1810. Elle reproduit exactement ce que transcrit le journaliste. On remarque à droite la tour de l'horloge, avec son cadran carré, appliqué à la muraille une dizaine de mètres au-dessous du campanile. Un groupe d'ouvriers est fort occupé à descendre le fameux timbre ou cloche.
Il y a une dizaine d'années, nous avons confié à un éditeur de cartes postales (Mme veuve Oudin), quelques autres gravures anciennes de Ravault et de Pensée, où l'horloge se trouve reproduite.
Nous avons oublié de dire que l'horloge de Paris, celle de 1370, serait l'oeuvre d'un spécialiste allemand de Vic, d'autres écrivent Vié, tandis que celle de Montargis est due à Jean Jouvence ou Jouvente.
Or, voyez l'incertitude de quiconque veut fouiller les vieux grimoires. Le Magasin Pittoresqne, T. 2, 1834, p. 59 (ce bon vieux magasin illustré, qui vient de mourir l'an dernier et qu’Edouard Charton a bourré de tant de trouvailles), donne le texte suivant comme un exemple de chronogramme curieux: « Sur la cloche du Palais (de Paris) fabriquée en 1371 se trouvaient six vers en lettres gothiques. Les trois premiers contiennent le chronogramme, les trois derniers l'expliquent.

charLes roi VOLt en ce CLOcher
cette nobLe CLOche aCroCher
FaItte poUR sonner ChaCVne hevr.
La date esdits trois vers d'asseur
par Jean Jouvenet fut montée
qui de cet art ot renommée.

Calcul du chronogramme : C - 100 ; L -50 ; V-5 ; L-50 ; C-100 ; C-50 : C-100 ; C-100 ; L-50 ; C-100 ; L-50 ; C-100 ; C-100 ; C-100 ; I-1 ; V-5 ; C-100 ; C-100 ; V - 5 : V - 5. Total. 1.371.
Ainsi donc Jouvence ou Jouvente devient Jouvenet, et la première grosse horloge construite en France est l'œuvre d'un Français et non d'un Allemand et porte la date de 1371.

LE PATIS EN L'AN VIII DE LA RÉPUBLIQUE

Note de M. Barrier relative à un plan du Pâtis de Montargis dressé en l'an VIII de la République.
J'ai l'honneur de vous communiquer un Plan du pâtis de Montargis établi en l'an VIII de la République, pour projet d'établissement d'un champ de foire et d'une plantation.
Ce plan nous a été remis, sans affectation particulière, par un généreux donateur qui s'intéresse aux travaux de notre société et je me propose de le verser dans notre collection de cartes et plans, sous le n° 4.
Il présente, en effet, un certain intérêt rétrospectif et c'est un document qu'il importe de conserver.
Le canal y figure, bien entendu, sous le nom de canal du Loing, car, à cette époque, la jonction des canaux de Briare et du Loing se trouvait près de la mairie actuelle et cette jonction a été reportée depuis à Buges, qui est devenu le point de rencontre des trois canaux d'Orléans, de Briare et du Loing.
Le quai du Port y est indiqué comme chantier de radoub des bateaux, ce qui prouve bien que, l'industrie marinière était très active à Montargis, à cette époque.
L'ancien abreuvoir que nous avons connu près du théâtre, sur la rive droite du canal, figure sur ce plan, ainsi que le pont de 3 arches qui existait à cette époque en face la rue du Pâtis et qui était dénommé Pont du Pâtis et formait l'entrée de la Ville.
Le boulevard du Rempart n'existait pas, son emplacement était occupé par les jardins et par deux rangées de platanes dont une seule a été conservée et existe encore. Ces platanes sont donc antérieurs au plan, c'est-à-dire à l'an VIII de la République et on peut en déduire qu'il en est de même de la plantation sise sur le boulevard Durzy.
La rue du Port existait et était bordée de maisons dont l'alignement a été, depuis, régularisé, ainsi que l'indique le plan. Il en est de même des maisons qui sont actuellement en bordure du boulevard du Pâtis.
Bien entendu, l'avenue de la Gare ou route nationale n° 7, n'y figure pas, puisque la déviation de cette route ne date que de 1870.
On y remarque aussi, sans désignation, la rue Dom Pèdre, qui n'était, à cette époque, qu'une ruelle insignifiante dénommée « Ruelle aux Cochons » ; l'ancien gué établissant la communication entre le Pâtis et le chemin de la forêt (actuellement avenue Adolphe-Cochery), enfin, une passerelle pour piétons établissant la même communication en amont du Gué, laquelle a subsisté après 1870 et qu'on dénommait la Passerelle Chamillard.
L'Ile Tourteville y figure sous ce nom, elle comprend aujourd'hui le Tivoli et des jardins particuliers ; y figure également une passerelle donnant actes a ces jardins et qui existe encore.
Une légende très explicite donne l’indication des ouvrages projetés, savoir :
1° Création de 268 parcs pour les moutons, chacun en pouvait contenir 100 et ce nombre pouvant être porté à 300 par le resserrement des allées qui devaient les séparer. L'hypothèse de foires pouvant amener 30.000 moutons à Montargis était donc envisagée à cette époque.
2° Création ou localisation d'un champ pour le rassemblement des chevaux près de la rivière du Loing et d'un autre près de la rue du Port pour le rassemblement des vaches normandes (sic) ; les autres devant être réunies sur le Parc des Moutons après le départ de ceux-ci.
3° Plantations diverses en quinconce des allées et contre-allées prévues, en ormes pour bordures et en platanes à l'intérieur.
4° Plantations de peupliers le long de la rivière du Loing et de la rue du Port, qui était séparée du Pâtis par un fossé.
5° Plantations en face l'entrée de ville de deux rangées de platanes au nombre de 20.
6° Boutiques présentant un caractère provisoire pour marchands, corps de garde, cafés, emplacements pour spectacles, courses et divertissements ; enfin, cabines de traiteur et de marchand de vins.
Ce projet était parfaitement logique et très bien étudié, l'ensemble était parfait ; on s'en est inspiré plus tard, mais sans le réaliser tel qu'il fut conçu.
On ne retrouve pas sur ce plan de l'an VIII de la République, l'autel de la Patrie, signalé comme ayant existé sur le Pâtis.
En tout cas, ce plan constitue un document des plus intéressants et nous vous proposons de le verser dans les archives de notre Société.
BARRIER, ingénieur.

31è Séance. - 21 Juin 1923

Jeudi 21 juin 1923, à 17 Heures, la Société a tenu sa séance ordinaire en la salle de la Bibliothèque municipale, sous la présidence de M. J. Ouachée. Etaient présents : MM. l'abbé Lane, Pouillot, Barrier, abbé Crespin, Gourdin, Pétré et Leroy. S'étaient fait excuser : MM. Bonpain, Midol et Moussoir.
M. le Président donne lecture d'une lettre de notre collègue, M. F. Gibert, qui veut bien prendre rang parmi les conférenciers de la saison prochaine et dont le concours est enregistré avec plaisir. A ce propos, on ébauche un programme. On pense que l'on aura la bonne fortune d'obtenir l'adhésion des conférenciers déjà entendus à la satisfaction générale et que de nouveaux viendront se joindre aux premiers pour qu'il soit possible de donner une conférence toutes les trois semaines, du 15 septembre au 15 avril. Les subventions du Conseil Général et de la Ville, ainsi que l'adhésion de nombreux membres honoraires sont autant de raisons pour que la Société d'Emulation manifeste toute l'activité possible.
Reprenant l'enquête sur la recherche des souvenirs Montargois relatifs à Jeanne d'Arc, M. l'abbé Crespin cite quelques traditions, recueillies par un ancien curé de St Germain, l'abbé Rouette et par un prêtre de l'Yonne, M. l'abbé Parrat (brochure éditée : Avallon 1909).
Pour M. Rouette, Jeanne d'Arc est passée une première fois à Montargis en allant d'Auxerre à Gien et Chinon et il donne à l'appui quelques vieux souvenirs concernant le château de la Brulerie et le Gué-Zard, M. l'abbé Parrat indique une autre route ; Auxerre, Toucy, Bléneau et Gien ; en 1850, on montrait encore à Toucy le chemin de Jeanne d'Arc, et l'on disait qu'elle avait couché au château du Grand Villars avant d'arriver à Bléneau.
Quant au 2è passage, en juin 1429, lorsque l'armée royale se dirigeait sur Reims, la tradition qui la voit à Montargis ajoute qu'elle aurait visité l'Eglise de Villefranche St-Phal, traversé Lépeaux, couché au château de Chevillon et regardé des hauteurs de Volgré la ville de Joigny.
Une autre tradition, toute différente la fait passer beaucoup plus sur St Sauveur où l'on montrait jadis « le chêne de Jeanne d'Arc », à Coulanges-sur-Yonne où près d'un vieux chemin se trouve encore « la pierre de la Pucelle », à Cravant où Jeanne aurait visité dans un faubourg, N. D. d'Arbard, et, en effet, il ressort des textes du XVè siècle (le geste des nobles Français, Moustrelet, Chartier et procès de Rouen) qu'au moins une partie de l'année, prit la route du sud Bonny, Saint Fargeau, Cravaut et Coulanges. Mais Jeanne y était-elle ?...
En résumé, pour ces deux premiers passages à Montargis M. l'abbé Crespin estime que les traditions sont trop diverses et les textes historiques trop imprécis pour qu'on puisse avoir une certitude.
M. Le Roy maintient que c'est à Montargis que Charles VII, parti de Sully, vint rejoindre Jeanne, partie deux jours plus tôt de Gien. Ou pensait pouvoir gagner Reims « en allant droit à la cité de Troyes ». Mais les Anglo-Bourguignons de Sens barrant la route, on prit à Montargis le chemin d'Auxerre par Châteaurenard. Parmi les 12.000 hommes de cette expédition, devaient se trouver certainement les milices de Montargis et de Châteaurenard qui avaient participé, du 3 au 9 mai, à la merveilleuse délivrance d'Orléans, sous les ordres de Jeanne d'Arc. A Montargis, on était en bonne terre française, chez les vainqueurs de 1427, chez ces patriotes que Charles VII - à Jargeau-sur-Loyre, en may 1430 (avant même la captivité de Jeanne, 24 mai 1430) - déclarera avoir été « le commencement de son premier bien et bonheur à l'encontre desdits ennemis ».
Jeanne d'Arc est bien passée quatre fois à Montargis.
A propos du tricentenaire de Pascal, M. Le Roy rappelle qu'il y a eu, autrefois, une rue Pascal, à Montargis. Cette rue avait été établie lors de la création du quartier neuf, qui s'élève sur les anciens terrains des Récollets et du Chinchon, l'ancien marais desséché par ces moines. Elle commençait à la place des Récollets et se terminait à la rue Périer. C'est M. Alexandre Périer, ancien député, conseiller général et maire de Montargis, mort en 1845, qui a fait don du sol des rues nouvelles. L'une s'appelle de son nom, rue Périer, l'autre de celui de sa femme, née Pascal. Plus tard, la vieille rue du Bon Guillaume a absorbé la rue Pascal, comme aussi la rue de Loing celle du Pont de Puiseaux.
La séance prend fin par une visite au musée.
Depuis la dernière réunion, MM. l'abbé Lane, Barrier et Leroy ont eu le plaisir d'assister à la trouvaille d'une superbe poterie gallo-romaine, un Dolium, que M. Ganivet a été assez heureux d'extraire à peu près intacte du sol de la ville antique qui occupait le territoire des Closiers-Montargis, sur près de 40 hectares. M. Ganivet et sa femme ont bien voulu offrir, pour le Musée municipal cet intéressant document. II se trouve maintenant exposé dans la vitrine qui contient des poteries de même origine. Les plus vifs remerciements sont adressés aux généreux donateurs.
On peut également maintenant admirer là très importante collection coloniale offerte l'an dernier par Mlle B. Magniez. Sur les ordres de M. le Maire de Montargis une grande vitrine spéciale a été construite ainsi que deux grandes panoplies pour exposer les armes rapportées par M. Gustave Magniez, de la mission Savorgnan de Brazza. Un rayon d'une autre vitrine est consacré à des porcelaines rares, de vieilles dentelles, etc., que la donatrice a bien voulu joindre à la collection de son père.
La séance est levée à 19 heures. La prochaine réunion aura lieu le 5 juillet.


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