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Le premier numéro du bulletin de la
Société d'Emulation de Montargis

Texte intégral

 

mai-juin 1853


Extrait de l'Indicateur des 25 mai et 1er juin 1853.

INAUGURATION DU MUSÉE DE MONTARGIS.

 

L'arrivée dans nos murs de M. le Préfet du Loiret, visitant pour la première fois notre arrondissement, vient d'être l'occasion, pour notre ville, d'une fête qui laissera parmi nous de précieux souvenirs.

Déjà, dans la réception qui lui avait été faite lundi, notre nouvel Administrateur avait remarqué avec un véritable intérêt, et signalé avec unie bienveillance parfaite, le concours empressé de la population, la bonne tenue de nos sapeurs-pompiers et l'exécution très satisfaisante des morceaux joués par notre Musique militaire.

Durant la réception qui a été très nombreuse, M. le Préfet a eu pour tous de bonnes, d'encourageantes paroles; il a insisté, au nom de l'Empereur, auprès de MM. les Maires du canton, sur le désir de connaître les besoins des populations, afin de pouvoir les satisfaire dans la mesure du possible. Un incident qui a paru particulièrement le toucher a été la présentation des jeunes orphelines, dont une lui a offert un volumineux bouquet et lui a débité avec intelligence un compliment très convenable ; M. le préfet, en remerciant la bonne et digne supérieure, qui accompagnait ces pauvres petites, lui a demandé la permission d'embrasser celle qui avait été l'orateur de la troupe et qui paraissait toute heureuse de ce témoignage de bienveillance.

Le lendemain, mardi, a eu lieu, sous la présidence de M. le Préfet, l'inauguration du Musée de la ville de Montargis, et à ce sujet, nous ne pouvons nous refuser de payer un tribut bien mérité de remerciements et d'éloges, aux ordonnateurs de la fête improvisée, dont cette cérémonie a été le motif.

Après que, sous la direction du Maire, M. le Préfet et le nombreux cortège qui l'accompagnait, ont eu visité les salles de notre nouvel établissement et exprimé leur étonnement du nombre considérable d'objets précieux dont il se composait déjà, ainsi que de l'ordre intelligent suivant lequel ces objets étaient disposés, le cortège a été conduit au foyer du Théâtre. Là, tandis que les yeux erraient dans un demi-jour sur les loges et les stalles occupées d'avance par nos dames en fraîches toilettes, tout à coup la toile du théâtre s'est levée au bruit des fanfares et a permis de contempler le buste de l'Empereur, entouré de trophées d'armes et de drapeaux, et surmonté de l'Aigle scintillant des mille feux du gaz, qui partant aussi de nombreux chiffres de l'Empereur, projetait l'éclat de sa lumière sur les brillants uniformes de nos musiciens et les gracieux décors de la scène, tandis que le reste de la salle restait dans le pénombre.

Après l'audition de l'air devenu national de la reine Hortense, MM. les Préfet, sous-préfet et Maire ont pris place devant une estrade réservée pour eux et en présence d'un nombreux et sympathique auditoire, M. le Maire a prononcé un discours auquel M. le Préfet a répondu dans les termes les plus propres à faire comprendre que lui aussi s'associait aux espérances que donne à la ville le nouvel établissement, dû à la bonne harmonie et au concours aussi actif qu'intelligent de nos autorités.

En attendant que nous consacrions quelques-unes de nos colonnes à l'historique et à la statistique de notre jeune Musée, nous sommes heureux de pouvoir mettre sous les yeux de nos lecteurs les deux discours, dont son inauguration a été l'occasion et qui perpétueront le souvenir d'une fête destinée à prendre sa place parmi les événements intéressants de notre ville.

 

DISCOURS DE M. LE MAIRE.

 MESSIEURS,

 Si j'avais pu avoir des doutes sur le succès de notre nouvel établissement, ils seraient complètement dissipés aujourd'hui devant votre bienveillant empressement à venir présider à son inauguration. Ce concours de tant d'honorables suffrages ne nous prouve-t-il pas en effet que, comme nous, vous avez compris que, pour qu'une ville vive de la vie active de notre époque, pour que sa prospérité soit assurée, il ne suffit pas d'y fonder des établissements qui garantissent l'existence matérielle de ses habitants, il faut de plus la doter de ces institutions spéciales destinées à faire naître et à propager dans les générations nouvelles l'amour de l'étude et le culte des beaux-arts ? Ne sont ce pas-là, en effet, Messieurs, avec la religion et la morale, les agents les plus propres à neutraliser ces tristes enseignements que plus d'un demi-siècle de révolutions à légués à nos populations et qui, égarant chez elles, au moral comme au physique, le sens du vrai et du beau, ont à plus d'une reprise menacé de replonger la France dans les ténèbres de la barbarie

Oui, Messieurs, donnons à notre population si intelligente le moyen de fixer son activité morale, et nous verrons, je l'espère, ces habitudes oisives et dissipées qui affligent encore quelques familles, disparaître graduellement et faire place à des mœurs plus régulières et plus douces, conséquences nécessaires de l'étude et de la réflexion. Que si cet espoir ne se réalise pas pour tous, soyez convaincus que du moins il ne sera pas complètement déçu, et que ce ne sera pas en vain que nous aurons convié nos jeunes compatriotes aux charmes qui naissent de la contemplation des oeuvres de l'art et de la nature.

De tout temps, en effet, le feu sacré n'a-t-il pas brillé parmi nos populations ? Et sans remonter à des époques éloignées, n'est-ce pas d'elles que sont sortis, entre tant d'autres, l'éloquent Mirabeau, le brave et illustre Gudin, le savant continuateur d'Anquetil, dans la génération duquel le culte heureux des arts semble être, comme la vertu, un privilège de famille, l'habile docteur Gastellier qui a laissé ici à pus d'un titre de si honorables souvenirs, les Ravault, les Becquerel, les Girodet, les Triqueti dont les noms réunis jettent sur notre arrondissement un immortel éclat.

Aussi, Messieurs, si notre institution est de nouvelle origine, gardez-vous de croire qu'elle n'ait pas existé dans la pensée de nos honorables prédécesseurs, trop dévoués aux intérêts de leurs concitoyens et trop éclairés en général, pour n'en avoir pas compris toute la portée. Mais les circonstance qui nous favorisent leur faisant défaut, ils étaient avec quelque raison effrayés, de l'avenir, d'une institution dont le présent seul leur paraissait susceptible d'être assuré. Nous, Messieurs, que la générosité posthume d'un homme de bien, d'un sincère amis du pays, a placés dans une position d'avenir bien autrement favorable, nous agissons avec sécurité, parce que nous sommes convaincus que, si l’observation rigoureuse des dernières volontés de M. Durzy ne permet pas de fondre notre établissement dans celui qui devra porter le nom de ce généreux citoyen, du moins elle ne s'opposera pas à ce que tous deux marchent parallèlement et se prêtent un mutuel concours. C'est dans cet espoir que, devançant les bienfaits de l'institution Durzy, et mettant à profit la bienveillance d'une honorable confraternité (*), nous avons essayé de réunir dans une salle d'étude, pour la coupe des pierres et de la charpente, des modèles que pourront consulter nos jeunes compatriotes; en même temps qu'ils trouveront dans les splendides ouvrages à gravures que nous devons à la générosité du Gouvernement, des guides précieux pour les arts du dessin et de la sculpture : et quant à l'étude de cette dernière, quel plus puissant encouragement pourrions-nous leur offrir, que de mettre sous leurs veux les oeuvres de l'illustre compatriote qui vient de nous traiter, avec tant de faveur, et dont honorable et bienveillante sympathie nous permet d'espérer de voir un jour notre musée rivaliser avec celui d'Angers, si justement fier de la collection des plâtres de David ?

il nous a semblé que, plus tard, et lorsque grâce à l'institution bienfaisante dont nous ne pouvons assez réclamer le prochain établissement, la jeunesse de notre ville recevra les leçons d'habiles professeurs, elle sera heureuse de trouver pour l'étude de l'histoire naturelle et des beaux-arts, le moyen de consulter et d'étudier les collections spéciales et les couvres des artistes éminents que le généreux empressement de nos compatriotes et la munificence du Gouvernement nous ont permis jusqu'ici de rassembler, et dont tout nous porte à croire que le nombre ne tardera pas à s'accroître dans les plus heureuses proportions.

Et c'est ici le moment de témoigner notre profonde gratitude pour l’honorable et bienveillante sympathie avec laquelle notre oeuvre a été accueillie et qui l’accueille encore de toutes parts. Que les personnes généreuses auxquelles nous, devons déjà l'avantage de voir notre Musée rivaliser de richesses artistique avec ceux des villes les plus favorisées et qui sont loin de pouvoir tous, comme le nôtre, décorer leur livret des noms des Girodet, Zurbaran, des Giorgione, des Triqueti, des Jacquard, des Turpin de Cressé, des de Lannoy, des Rosa Bonheur, des Antigna, que ces amis généreux des arts et de leur pays reçoivent par ma voix les remerciements de notre cité reconnaissante; qu'ils les reçoivent aussi ces donateurs d'objets de toute nature dont quelques-uns sont d'une valeur artistique incontestable et dont les autres, sans avoir peut-être le même prix aux yeux du collectionneur mercenaire, n'en sont pas moins pour nous pleins d'intérêt à plus d'un titre. Car Messieurs, c'est encore un bienfait d'une institution comme la nôtre, que cette sorte de confraternité dont elle devient l'origine et qui fait que chacun s'empresse de venir payer son tribut quelque modeste, qu'il puisse être, parce que chacun sent le besoin de contribuer à une oeuvre qui en définitive existe pour le plaisir ou l'instruction de tous, et qui rattache ainsi par le lien si puissant et si doux de l'amour des arts et du pays, tous les citoyens d'une même ville, d'un même arrondissement, à un centre commun de plaisirs purs et de moyens de développement intellectuel.

Permettez-moi, Messieurs, d'envisager avec vous notre nouvel établissement sous un dernier point de vue, à l'occasion du quel nous sommes heureux et presque fiers de nous trouver en conformité d'idées avec des esprits éminents de notre époque. N'est-il pas vrai que l'institution des collections provinciales est l'unique moyen d'arracher au vandalisme de l'ignorance et de l'oubli et de conserver à la science et à l'étude, une foule d'objets épars dont les uns n'ont besoin que d'être mis en lumière pour être admirés de tous, mais dont le plus grand nombre n'a de prix qu'aux yeux exercés du connaisseur et de l'archéologue ? Or, je le demande à ceux qui ont pratiqué nos localités, pourrait-on pour fonder une de ces collections conservatrices, choisir un emplacement plus heureux que notre ville dont l'antique origine et la situation au centre d'un pays si rempli de souvenirs et de trésors scientifiques enfouis, nous permettra de recueillir en peu d'années et d'enlever à des mains ignorantes et profanes, tant et de si précieux souvenirs des temps anciens ?

Un mot encore, Messieurs, et ce sera pour rappeler ici ce que j'ai dit dans une autre enceinte, où mes paroles ont été accueillies avec tant de faveur.

Si notre Musée existe, s'il a pris un accroissement si rapide et si propre à nous, encourager dans nos efforts, il est pour moi de devoir rigoureux et tout à la fois bien doux de le proclamer, nous le devons à l’initiative qu’à bien voulu ,prendre notre honorable sous-préfet, à son active et puissante coopération. C'est lui (dût sa modestie souffrir de cet exposé fidèle) qui mettant spontanément au service de notre ville les précieuses relations que lui a crées son amour éclairé pour les arts, a obtenu du gouvernement les dons que nous en avons reçus et qui ont été le fondement de notre institution. C'est lui encore qui, par de nombreux appels a d'honorables amitiés, et par, de généreux abandons personnels, a enrichi notre Musée d'un grand nombre d'objets précieux, et concourt chaque jour a son extension par son active et persévérante influence.

 Permettez-moi, Monsieur le Préfet, en vous témoignant ma gratitude profonde pour la bienveillance avec laquelle vous avez consenti à honorer de votre présence cette cérémonie bien modeste sans doute, mais dont au moins le but est si bien en rapport avec vos sympathies pour tout ce qui peut concourir au développement intellectuel et à la prospérité des populations que vous administrez, permettez-moi de renouveler ici, les remerciements que le Conseil municipal a naguère adressés à votre digne collaborateur, en lui décernant par acclamation le titre de fondateur du Musée de notre ville. Qu'il me soit également permis de joindre à cette manifestation si honorable et si bien méritée, l'expression de ma reconnaissance personnelle et mes vœux pour une la parfaite harmonie qui n'a jamais cessé d'exister entre notre honorable sous-préfet et moi, puisse, sous votre puissant et bienveillant patronage, me donner les moyens de réaliser au profit de cette ville, les améliorations que je désire si ardemment pouvoir mettre à exécution.

 (*) Notre musée doit au généreux et sympathique concours de l’administration. Municipale d'Orléans, les modèles en bois et en plâtre déposés dans la Salle d’Etude.

 

RÉPONSE DE M. LE PRÉFET

 MESSIEURS.

 J'ai répondu avec empressement à l’appel qui m'a été fait par M. le Maire de Montargis, pour présider à l'inauguration du Musée municipal. Il n'en pouvait être autrement quand il s'agissait d'une oeuvre utile, quand il s'agissait de la seconde ville du département. Je devais d'ailleurs m'y trouver au milieu de vous, au milieu des représentants d'une population dont les sentiments me sont connus et qui mérite, je le sais, toutes les sympathies des délégués du gouvernement de l'Empereur.

M, le Maire a parfaitement fait ressortir à nos yeux le but, l'avenir de l'établissement qui vient d'être fondé ; je n'ajouterai que quelques courtes observations à l’exposé complet qu'il vient de vous faire.

On s'est plaint souvent en France que la capitale absorbât tout le mouvement intellectuel du pays, que l'art ne fût connu, apprécié, cultivé qu'à Paris;  que la province, privée de toute initiative, acceptât sans les comprendre les jugements, sans les apprécier les productions, les oeuvres d’art qui lui venaient d'ailleurs. Vous aurez combattu, Messieurs, l'exagération de cette tendance; par la fondation du Musée de, Montargis, vous contribuez à répandre dans la population le sentiment, le goût du beau : non seulement vous lui assurerez de nouvelles jouissances, mais vous développerez chez elle tout ce qu'on peut attendre de noble et d'élevé des intelligences qui ont le sentiment de l’art, qui le comprennent et le pratiquent.

Et ne croyez pas qu'il s'agisse seulement des spéculations élevées de l'esprit; le beau souvent touche à l'utile et, pour vous en donner la preuve, permettez-moi de faire appel à des souvenirs encore récents de notre amour propre national.

A l'exposition de Londres, la supériorité du goût français dans tous les. produits de notre pays a été constatée; on en a recherché l'origine et l'on a reconnu que cette perfection de contours était due aux études des contremaîtres et des ouvriers français, à l'enseignement du dessin qui développe leurs facultés naturelles et leur donne ce sentiment, cette intelligence de la forme qui, après tant de siècles, fait encore rechercher et payer bien cher, les oeuvres de certains ouvriers de l’antiquité, des vases, des bronzes où l'habileté de l'auteur a été presque du génie.

Enfin, Messieurs, les faits parlent plus haut que le raisonnement ; à Londres, à Berlin, on cherche à fonder pour les ouvriers des écoles de dessin et d'ornement.

Vous allez, grâce à la libéralité d'un de vos concitoyens, créer un établissement complet qui élèvera le niveau de toutes les intelligences et donnera satisfaction à toutes les classes. Les recherches archéologiques, l'étude de l'histoire ne seront pas la partie la moins intéressante des travaux dont cette journée sera le point de départ; les nations ne vivent pas seulement du présent, elles vivent de leurs souvenirs comme de leurs espérances. Vous le savez tous, Messieurs, certains noms, certains récits de notre histoire remuent les cœurs à l'égal de toutes les oeuvres dues aux plus brillantes imaginations. Il est beau d'habituer un pays à être fier des oeuvres de ses pères, ceux qui se respectent dans le passé de la gloire nationale apprennent à ne laisser à leurs successeurs que d'honorables exemples.

Enfin, et M. le Maire vous le disait tout-à-l'heure avec une grande vérité, il faut donner un aliment aux imaginations vives de nos compatriotes, qu'on n'a entraînés au mal qu'en exploitant leur ardeur ou leur ennui : il faut nourrir d’une instruction solide et morale, de principes nobles et élevés une population qu’on a voulu à une époque d’erreur, déjà loin de nous, empoisonner de doctrines dangereuses sans vérité comme sans honneur. C'est le vœu de l'Empereur, qui veut que l’intelligence, le bien-être, la morale arrivent partout où on pourra les faire pénétrer. Vous aurez la satisfaction d'avoir deviné ses intentions; et nous qui le représentons dans ce département; nous pouvons vous donner l'assurance qu'il vous sera toujours reconnaissant du bien que vous aurez fait au pays.

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SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DE L'ARRONDISSEMENT

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 Dans un précédent numéro, nous avons pris l'engagement de consacrer quelques-unes de nos colonnes à faire connaître à nos lecteurs, la manière vraiment merveilleuse dont s'est formé notre musée, et à donner, un aperçu de ses principales richesses; en attendant le catalogue raisonné que, sous la direction de ses honorables fondateurs, nous nous proposons de publier dans ce journal, en divers articles.         .

Le vif intérêt qu'inspire notre jeune établissement à la population tout entière, nous fait espérer qu'on nous saura gré de né pas différer plus longtemps à tenir notre promesse.                                    .

Il y a cinq mois à peine, qu'à l'exception de quatre toiles dont une seule a été transportée au Musée, les trois autres ornant encore en ce moment la grande salle de l'Hôtel-de-Ville; à l'exception aussi de quelques dessins et du plus grand nombre des plâtres qu'on voit actuellement au Musée, et qui tous étaient enfouis, ainsi qu'un petit nombre d'autres objets, dans la poussière des greniers de la Mairie, il n'existait pas trace de collection artistique publique à Montargis.

C'est dans ces conditions que nos Administrateurs, désireux de donner à l'imagination active de nos concitoyens et particulièrement à l'intelligence de notre jeune génération un aliment utile, conçurent la pensée d'employer au profit de notre ville, d'honorables et précieuses relations et obtinrent ainsi du gouvernement, un premier don qui par son importance dépassa dès-lors leurs espérances.

Forts de cet encouragement, ils n'hésitèrent pas à faire appel aux sympathies du plus grand nombre des personnes de la ville et de l'arrondissement qui aiment les arts ou qui s'en occupent à divers titres : toutes ou presque toutes comprirent l'importance d'établir dans notre ville un centre de collections qui appartenant de fait, si ce n'est de droit, à d'arrondissement tout entier, permettrait de sauver de l'oubli et d’arracher aux mutilations de mains  ignorantes, une foule d'objets d'art qui, isolés, ne sauraient être la matière que d'une stérile curiosité, tandis que de leur réunion peuvent naître d'utiles et précieux  enseignements.

C'est depuis lors qu'avec une générosité et un empressement qui témoignent si haut de leur intelligence et de leurs nobles sentiments, nos honorables compatriotes non seulement firent des dons personnels dont quelques-uns ont une très grande valeur, mais n'hésitèrent pas à mettre à contribution en faveur de notre Musée, les artistes et les amateurs de leur connaissance; et c'est ainsi que se forma avec une rapidité et un entrain véritablement inespérés, une collection qui, malgré sa récente origine, se compose déjà de quarante et une toiles (ou panneaux), dont quelques-unes de grande dimension et de très sérieuse valeur artistique ; de treize dessins originaux ; de sept pastels dont quelques-uns d'une origine célèbre ; de quelques gouaches rapportées d'Italie; de vingt et une très bonnes gravures sous cadres, non comprises celles si remarquables et si nombreuses qui, dues à la munificence du Gouvernement, sont conservées en portefeuille; enfin d'un nombre très considérable de plâtres, terre cuite, biscuit, bronze, tous précieux : sans parler ici d'une riche collection d'oiseaux, d'objets d'art, d'histoire naturelle, d'archéologie, de sculpture, de numismatique, d'art céramique, etc.

Mais au milieu de cette affluence de richesses qui ne s'est point encore tarie, on ne peut se défendre d'une pensée inquiète ; évidemment cette source de prospérité ne peut toujours durer; un peu plus tôt ou un peu plus tard viendra le moment ou elle fera défaut et où, privé des ressources indispensables à son entretien et à son accroissement, ou n'en ayant que d'insuffisantes, notre Musée subira fatalement la loi commune à tout établissement de ce genre qui ne rappelle pas de temps à autre ses visiteurs, par l'attrait de nouveaux objets d'étude ou de curiosité.

C'est dans le but de prévenir ce grave inconvénient et aussi, pour arriver à coordonner les moyens les plus propres à réunir des diverses parties de l'arrondissement dans un centre commun, les renseignements et les objets matériels qui se rattachent à l'étude de l'histoire locale, de l'archéologie, des beaux-arts et des sciences naturelles que, sur la demande de M. le Maire de la ville de Montargis, M. le Préfet du Loiret vient d'autoriser la création, pour notre arrondissement, d'une Société dite d'Émulation dont nous donnons ici les principaux statuts :

 ARTICLE  PREMIER.

Une société est  établie sous le nom de Société d’Emulation de l'arrondissement de Montargis, pour la recherche, l'étude la description et la conservation des objets relatifs à l'archéologie, à l'histoire, aux beaux arts et aux sciences naturelles.

ART. 2.

La société rassemble et conserve dans le Musée de la ville de Montargis, tous les objets ci-dessus désignés. Une salle d'étude et une Bibliothèque technologique sont annexées au Musée.

ART. 3.

Le siège de la société est fixé dans la ville de  Montargis; le Musée et la Bibliothèque ne pourront être divisés.

ART. 4.

Les collections composant le Musée et la Bibliothèque seront choisies et dirigées de manière à compléter l'institution Durzy. Elles auront aussi pour but de faciliter et de développer, en ce. qui concerne les sciences naturelles, l'instruction donnée aux classes ouvrières et aux élèves du collège de Montargis.

ART.5.

La société conservera dans son Musée, les souvenirs historiques spéciaux à l'arrondissement. Elle perpétuera la mémoire des citoyens qui se seront illustrés dans l'arrondissement par des actions d'éclat ou des oeuvres utiles.

ART. 6.

La société se compose de membres fondateurs, de membres honoraires et de membres titulaires.

Sont membres fondateurs :

MM  De Girardot, président de la Commission administrative ;

Ballot, vice-président;

Huette, secrétaire;

               { Conservateurs

 
Guillaume (Désiré), bibliothécaire archiviste et trésorier ;

Legrand ;

Dumeis ;

De Vaublanc (Casimir) ;

Maulmond ;

Sont membres honoraires :

Le sous-préfet de l'arrondissement, le Maire de la ville de Montargis, les membres du Conseil général appartenant à l'arrondissement, ceux du Conseil d'arrondissement et du Conseil municipal; MM. les Maires, Curés et Juges de Paix des chefs-lieux de cantons.

Seront membres titulaires, toutes les personnes qui concourront à l'entretien et au développement du Musée, en s'engageant à une cotisation annuelle de cinq francs, payable dans le cours du mois de juillet de chaque année.

Les membres titulaires et autres, que leur position spéciale mettra dans le cas de pouvoir fournir des documents et matériaux propres à aider la société dans ses travaux et ses recherches, seront instamment priés de lui prêter leur concours : leurs communications et leurs dons, comme aussi ceux des autres bienfaiteurs du Musée, seront inscrits aux archives de la société et mentionnés dans les bulletins de son compte-rendu, en fin de chaque année.

ART. '7.

La cotisation annuelle de 5. fr. n'est obligatoire que pour les membres fondateurs et titulaires; elle est purement facultative pour les membres honoraires.

 

Cette cotisation si minime pourrait, on le conçoit, devenir un moyen puissant d'entretien et d'augmentation progressive de notre Musée, si, comme nous n'en doutons pas, les personnes qui ont accueilli avec tant de faveur notre nouvel établissement, s'empressent de réclamer le titre de membres titulaires, titre qui leur donnerait le droit de visiter chaque jour le Musée et d'y conduire les étrangers auxquels elles désireraient en faire les honneurs.

On comprend tout le parti que pourrait tirer d'une subvention annuelle même modeste, une administration intelligente qui, ayant à Paris des correspondants sûrs et spéciaux, se procurerait par leur intermédiaire quelques-uns de ces objets d'art que les hasards des ventes publiques livrent parfois à des prix si minimes relativement à leur valeur.

Cette idée dont l'importance paraît avoir été comprise par les honorables fondateurs de notre Musée, sera, nous en sommes certains, goûtée par tous les hommes d'intelligence de notre arrondissement qui s'empresseront sans doute de venir s'inscrire sur la liste déposée à cet effet au secrétariat de la Mairie.

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AVIS.

 Pour éviter un déplacement incommode aux personnes qui désireraient s’associer à l’œuvre de conservation et d'accroissement du Musée, le Conseil d'administration de la société a décidé qu'il serait joint à l’envoi des précédents extraits de l'lndicateur, un bulletin qu'il suffira de remplir, signer et faire déposer à la Mairie, pour recevoir en échange une carte nominative de Membre titulaire, au moyen de laquelle on pourra visiter le Musée tous les jours, seul ou accompagné des personnes qu'on désirerait y conduire.

 Le Maire de la ville de Montargis, vice-président

du Conseil d'Administration,

 BALLOT.


Montargis. - Imprimerie de Chrétien.


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