Le poste de Châteaurenard

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Après le château de Montargis, Claude Chappe a été tenté par la bordure Nord du petit plateau des Marchaisons, au dessus de la ferme des Liziards, à 2 km env. au Sud-Est de CHATEAURENARD. Depuis, bien entendu, tout le monde désigne l'endroit sous le nom de "climat du Télégraphe". Le cadastre en a pris acte. De là, on domine toute la vallée de l'Ouanne. La visibilité est parfaite vers Montargis ou Amilly. Vers Douchy, on ne voit actuellement que le Bois du Bourdillon. Il n'existait semble-t-il pas, à l’époque du fonctionnement (ce n'est pas certain). S'il existait d'ailleurs, l'impérieuse obligation officielle de couper immédiatement les végétations gênantes et d’élaguer régulièrement permettait une vue tout à fait correcte.
Rares sont les documents. Cependant le Musée Postal de NANTES conserve un "Dépliant", datant de 1806, contenant une représentation, dans le genre naïf, des quarante premières stations de la ligne. Sur le Dessin de CHATEAURENARD (15e station à partir de Paris) on aperçoit une ville encore close, des murs de laquelle s'échappent deux ou trois bras de l’Ouanne. La Fiche donne des renseignements pertinents sur la ville et ses productions. La dernière indication, un peu sibylline, signifie que les stations situées au delà de DOUCHY ne sont pas visibles.

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La tour n'existe plus. Cest en vain qu'une description précise de celle-ci a été recherchée dans les divers actes de vente ou de partage rédigés depuis I' aliénation par l'Etat, en 1852. Tous se bornent à définir une vague chambre à feu, avec grenier au-dessus. Par eux, on apprend cependant que la parcelle ou elle se trouvait, n°383 (Section K) du cadastre de 1840, close de haies vives, avait 374 m2. Le jargon des notaires la nommait "aisance du Télégraphe". Pour en connaître davantage et se faire une idée, il ne reste que le souvenir recueilli auprès des derniers acquéreurs.
Sur cette hauteur, il n'avait pas été nécessaire de construire une tour très élevée. La fiche du dépliant de Nantes indique que "le poste n'a que sept pieds", ce qui parait faible. L'Atlas de Kermabon, sans doute plus réaliste, donne cinq mètres cinquante.
Depuis Paris, on avait construit les différentes stations avec les matériaux disponibles sur place. Certaines l'ont été légèrement, en bois s'il n'y avait rien d'autre. Sur les deux clochers de l'itinéraire, de simples cabanes en planches ont été hâtivement confectionnées. Aux Liziards, à l'inverse, on fit "du solide". Les ouvriers n'allèrent pas loin pour alimenter le chantier avec d'énormes moellons. Les ruines de l'antique château-fort de Vilhabert étaient toutes proches. (à peine à un kilomètre au Sud). Elles servaient depuis quelques temps déjà, de réserve de matériaux. Les propriétaires successifs en tiraient profit, sans respect pour d'aussi vénérables murailles. Les maçons de Claude CHAPPE y puisèrent abondamment.
La salle basse, assez exiguë, de forme carrée reposait sur d'incroyables fondations épaisses de près de deux mètres. Elle était pavée, non pas de terre cuite comme Il est fréquent dans la région, mais de respectables dalles parfaitement lisses et jointoyées. Les murs avaient environ un mètre d'épaisseur. Celui de droite en entrant, plus épais encore, contenait une cheminée assez haute et un petit four a pain, le tout agencé avec d'antiques pierres.
Par la suite, pour améliorer la capacité de logement et dusage, on avait construit de matériaux plus légers, deux appentis, appuyés sur l'un des cotés et sur l'arrière.
Au dessus de la salle basse se trouvait la cabine, (baptisée grenier par le tabellion) à laquelle on accédait sur un coté par un raide escalier de bois (disparu depuis longtemps et remplacé par une échelle sur le devant). Là se tenait l'opérateur de service, assis en face du mécanisme de commande constitué d'un levier-balancier axé en son milieu, pourvu de deux manivelles aux extrémités. Pour les actionner, des câbles reliaient cet ensemble aux grands bras extérieurs visibles de loin. Dans ce local l'opérateur disposait en outre de deux puissantes longues-vues, calées dans des boites, toujours braquées par des lucarnes, chacune sur l'une des deux stations voisines. En effet, le clocher d'Amilly est à 11 km et la hauteur de Coufrault est à 13 km. Il contrôlait ainsi en permanence les positions des bras qu’affichaient ses voisins. Dés qu'un signal était formé, il le reproduisait au profit de l'autre station, et il le maintenait jusqu’à ce qu'elle le copie correctement. Ainsi de suite, dans un sens ou l'autre selon la destination de la dépêche et ceci, tant que la visibilité le permettait.
Malheureusement, si lourdement construit qu'il fut, le bâtiment du Télégraphe des Liziards, inutilisé, menaçait ruines à son tour. Gênant pour la culture moderne, il a été mis à mort et achevé en 1978. D’assez mauvaises photos (trop floues pour être publiées) commémorent l’événement. Elles permettent cependant d'apprécier les dimensions relatives de l'ensemble. En guise de souvenir, un alignement de quelques pierres non réemployées est encore visible devant la maison de l’actuel propriétaire.
Les registres communaux, systématiquement explorés, révèlent les noms de quelques agents télégraphiques. Le premier découvert, du nom dé CARTIER Louis, semble avoir été formé sur la ligne de BREST, (la troisième ligne du réseau CHAPPE). En effet, la naissance d’Hippolyte son fils aîné, a été enregistrée le 16 Vend. An 11, à PLERIN, dans la banlieue de Saint BRIEUX (Côtes du Nord). Tous ses autres enfants sont nés aux Riglets, hameau proche des Liziards, où il avait installé sa famille. Il est mort à 43 ans, le 9 février 1819, laissant à sa veuve Louise Jeanne TERLET, une famille nombreuse à nourrir. Jeanne Terlet finira sa vie à Saint Germain des Près.
Jean CAUBERT, le second, apparaît uniquement le 9 Février 1819, en qualité de témoin, délégué pour déclarer le décès de son collègue ci-dessus.
Hippolyte CARTIER, le fils aîné d’origine bretonne, a immédiatement remplacé le père. Il était déjà "Télégraphié" depuis quelques temps, lors de son mariage, le 26 Juillet 1823, avec Marguerite SEGUIN, jeune lingère originaire de MONTBOUY. Le jeune couple habitait au bourg, (sans précision). Ils eurent, à leur tour, une nombreuse progéniture, que les décès en bas âge ont toutefois un peu clairsemée. Hippolyte servira fidèlement de 1820 jusqu’à la fin de l'exploitation de la ligne. Cette fidélité sera récompensée, sans doute dans sa personne ou sinon dans celle d’un de ses enfant, car, parmi les premiers agents du télégraphe électrique de MONTARGIS figure précisément un CARTIER. Il est mort à 72 ans à la Bouzie, le 7 Décembre 1874. L'acte lui donne alors la profession de manœuvre. Marguerite SEGUIN, son épouse, disparaîtra le 28 Février 1885. Elle habitait alors aux Cassines, sur les hauts de Châteaurenard.

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