La Libération de Château-Renard et de son canton
par Hugues Vassereau |
Lors de recherches aux Archives du Service Historique de la Gendarmerie
Nationale, au Fort de Charenton, à Maisons-Alfort (Val-de-Marne), jai pu, entre
autres, consulter les registres de la Brigade de Gendarmerie de Château-Renard pour la
période de lOccupation, la Libération et les années suivantes.
Jai pris ainsi connaissance de deux documents intéressants sur la Libération de
Château-Renard. Il sagit de rapports rédigés pour sa hiérarchie par le
Maréchal-des-Logis Chef Porte, Commandant la Brigade.
Vous trouverez, ci-dessous, le texte du premier, daté du 9 novembre 1944.
5e Légion Compagnie du Loiret Section Montargis Brigade de Châteaurenard 75/25 (1)
Châteaurenard, 9 novembre 1944 (2)
RAPPORT
du Maréchal-des-Logis Chef Porte, Commandant la Brigade de Châteaurenard, sur
lhistorique de la libération de la Circonscription (3)
Réf. : Note Section du 4/10/1944 (4)
Pendant loccupation allemande de 1940 à 1944, des groupes "de résistance" se sont formés dans les communes de la circonscription. Leur action contre les troupes doccupation sest surtout manifestée en 1943 et 1944 : parachutages darmes, destructions de voies ferrées.
Le personnel de la Brigade que les gendarmes Denis, Bruandet et Stefani (5) commandent provisoirement en labsence du Maréchal-des-Logis Chef Porte, détaché, a su faire la sourde oreille aux dénonciations quil recevait, aux renseignements qui lui parvenaient sur la formation de ces groupes et sur leurs actes, afin de ne pas les démasquer aux allemands.
De nombreux jeunes gens avaient été désignés pour partir travailler en Allemagne. Certains ont refusé de se soumettre et ont préféré se cacher dans les fermes environnantes, ils étaient appelés "les réfractaires" (6) Les gendarmes, qui étaient chargés de les rechercher et de les arrêter, ont, au contraire, favorisé leur fuite en les avertissant des recherches dont ils étaient lobjet.
Aussi, la Feldgendarmerie et la Gestapo, devant la passivité des gendarmes de la brigade, venaient fréquemment dans la circonscription pour arrêter eux-mêmes réfractaires et hommes de la résistance.
Cest ainsi que le 8 juillet 1943, la Gestapo a fait irruption chez Carmignac à Chuelles, membre de la résistance, soupçonné de détenir un dépôt darmes parachutées. Carmignac et ses deux fils se défendent héroïquement, tuent deux allemands et en blessent un troisième, mais malheureusement, ils tombent sous les balles allemandes.
En septembre 1943, le Docteur Salmon, chef de la résistance, et M. Bellesteste, directeur des Écoles de Châteaurenard, sont arrêtés par la Feldgendarmerie. Faute de preuves, ils sont relâchés après trois semaines de détention.
Le 3 avril 1944, Manceau et son fils, de Chuelles, sont arrêtés par les allemands pour détention darmes. Le gendarme Mignon est inquiété à ce sujet, comme ayant eu connaissance de la présence darmes chez Manceau. (7) (8)
Le 10 août 1944, un groupe des Forces Françaises de lIntérieur, cantonné au Charme (Loiret), attaque le château de Châteaurenard, occupé par les troupes allemandes. Participant à cette opération, lAdjudant-Chef de Gendarmerie Olivier, Camille, Adjoint au Commandant de Section de Gien, chef et instructeur de ce groupe des F.F.I., tombe héroïquement. (9)
Un des soldats des F.F.I. a été blessé au cours de lattaque, il a pu se réfugier chez une personne de Châteaurenard et se cacher ainsi des allemands. (10)
Le 12 août 1944, le gendarme Stefani, apprenant le fait, le fait soigner par un médecin, puis transporter à lhôpital de Montargis.
Le 23 août 1944, des colonnes de troupes allemandes battent en retraite et traversent la région, se dirigeant vers lEst, sous la poussée des armées américaines.
À Douchy, des F.F.I. de la région attaquent directement lennemi. Un groupe arrête un convoi allemand et fait 150 hommes prisonniers.
À Gy-les-Nonains, les hommes de la résistance attaquent huit voitures allemandes, dans une desquelles se trouve un Général. Ils font six tués. Trop faibles en effectif, les F.F.I. ne peuvent continuer la lutte et doivent se retirer.
Le 24 août 1944, à Châteaurenard, une colonne de 80 allemands armés, attaqués par les F.F.I., refuse de se rendre. Le gendarme Mignon négocie avec les officiers leur reddition. Ils nacceptent de se rendre quà la condition dêtre conduits aux Américains et le gendarme Mignon devra marcher devant eux. Les F.F.I. les encadreront. Le Gendarme Mignon se place alors en tête de cette troupe et les conduit aux troupes américaines, dont les premiers éléments sont arrivés au hameau des Motteaux, près de Châteaurenard.
Dès lors, la région était complètement libérée. Les troupes américaines avaient ainsi leur tâche facilitée pour leur avance vers lEst.
Le second rapport, daté du 24 décembre 1944, reprend le texte du premier dans sa quasi-totalité, mais comprend quelques variantes que lon retrouvera, en renvoi, à la fin du document ainsi que deux nouveaux paragraphes concernant plus particulièrement lattitude des gendarmes vis-à-vis de la Résistance.
Notes : variantes et ajouts relevés sur le rapport du 24 décembre 1944
Les rapports de cette brigade relatent la vie du Canton à cette époque, cette période mériterait dêtre étudiée plus à fond !
Archives du Service Historique de la Gendarmerie Nationale de Maisons-Alfort (Val-de-Marne)